"J'avais envie de changer de vie." Après trente années passées
dans l'informatique, Xavier Cazes s'est orienté vers la cuisine. "Je
me suis toujours intéressé à la nourriture, au local, au fait maison",
confie-t-il. Encouragé par ses proches, son premier réflexe a été de se former.
Même scénario pour Nadège Fadel, qui a ouvert "une cantine du midi"
à Paris, baptisée César & Paul. Après "une première vie" dans le
secteur de la santé, puis "une deuxième" en tant que chef de projet dans
une filiale d'IBM, elle ne voulait pas "arriver dans un restaurant sans
quelques bases".
Si Xavier Cazes a choisi la formule du CAP cuisine en cinq mois à
Ferrandi, Nadège Fadel, elle, a opté pour le MBA cuisine et entrepreneuriat de
l'ESG Executive Education, proposé en partenariat avec L'Atelier des chefs.
Deux profils, deux parcours, mais la même pression, le même stress lors des
premiers coups de feu. Dans le bar à tapas qui porte son nom, situé à deux pas
des Abbesses à Paris (XVIIIe), Xavier Cazes a assuré seul, pendant six mois, la
cuisine et le service, ce qui lui a valu une tendinite et des nuits très
courtes. Quant à Nadège Fadel, elle a perdu 4 kilos la première semaine d'ouverture.
"À l'ouverture, j'ai recruté trop de personnel"
"Même après avoir fait six mois d'extras chez Livio, à Neuilly, puis
être resté deux ans dans les cuisines du ministère de la Santé, quand j'ai créé
mon restaurant à Puteaux, j'étais très angoissé. J'avais peur de ne pas être à
la hauteur", raconte Raoul Coly. Ancien salarié dans le secteur des
assurances, il a passé son CAP de cuisine en accéléré à Ferrandi et ouvert O
Petit Club Africain en 2013. Aujourd'hui, cette table sénégalaise est passée de
25 à 75 couverts. Un succès que Raoul Coly explique, entre autres, par un
bon emplacement et une masse salariale limitée. "Au départ, j'étais seul en
cuisine et une personne assurait le service. Ce n'est que lorsque j'ai triplé
ma superficie que l'équipe est passée à cinq personnes."
"Ma principale erreur au moment de l'ouverture a été d'avoir recruté
trop de personnel", reconnaît Xavier Cazes. Depuis, il a ajusté le
tir : il n'ouvre plus que le soir, a confié ses fourneaux à une personne reconvertie
comme lui, et il assure le service. Même partage des tâches chez César &
Paul : "Je suis seule en cuisine et mon mari aide au service",
détaille Nadège Fadel. "On fait déjà plusieurs métiers en un, être
DRH en plus, c'est compliqué", ajoute Xavier Cazes.
"On a trouvé notre local sur Le Bon Coin"
"Une fois la formation terminée, nous proposons un accompagnement,
car les personnes en reconversion appréhendent souvent la mise en pratique de
ce qu'elles ont appris", souligne Pierre Chevallier, responsable de
MBA à l'ESG et directeur général du cabinet conseil F.A.C.T. Le suivi et les
conseils sont l'occasion d'aborder la problématique du business plan et de la
recherche d'un emplacement bien situé. "On a trouvé notre local sur Le Bon
Coin", raconte Nadège Fadel. Pas convaincue par les propositions des agents
immobiliers, elle a trouvé sur internet un local de 38 m2 rue Bénard
(XIVe), avec terrasse et vue sur une place arborée. "L'endroit où s'implanter
est primordial", confirme Muriel Bacher, camarade de promo de Nadège
Fadel à l'ESG. Actuellement en CDI dans la crêperie en face de César &
Paul, cette ancienne pro de la communication pour de grands groupes industriels
ouvrira en octobre une crêperie "dans le centre historique de Caen".
"J'ai
abandonné un bon job et un salaire"
"Il faut être passionné, sinon on ne tient pas le choc. Dans ma promo
à Ferrandi, nous étions une vingtaine : la moitié est retournée à sa vie
professionnelle d'avant." C'est Raphael Rego qui le dit. Brésilien,
il a renoncé, au milieu des années 2000, à une carrière dans le marketing pour
lui préférer la cuisine. Il quitte son pays natal pour rejoindre un Relais
& Châteaux à Sydney. En 2008, il pose ses valises à Paris, intègre L'Atelier
de Joël Robuchon, où il se hisse au poste de chef de partie. Autodidacte, il
veut un diplôme. Il s'inscrit à Ferrandi - qu'il finance avec des extras - et
passe son CAP de cuisine. "Comme les autres élèves qui venaient du marketing
ou de la finance, j'avais tout abandonné : un bon job et un salaire."
Une fois diplômé et après dix-huit mois chez Taillevent, il ouvre Oka ('ma
maison') en 2014, devenu Maloka ('votre maison'), dans le IXe arrondissement de
Paris : un restaurant de 35 m2 et dix-huit couverts. Aujourd'hui,
il s'apprête à ouvrir une deuxième adresse "plus
grande", rue Berthollet (Ve), toujours dédiée à la cuisine brésilienne, qui
sera (re)baptisée… Oka. Pour lui, "l'essai est transformé".
Publié par Anne EVEILLARD
jeudi 25 août 2016