Selon le ministère du Travail, les embauches en contrat de moins d’un mois ont été multipliées par 2,5 en vingt ans et représentent aujourd’hui 70 % des embauches. 30 % des embauches en CDD se font sur des contrats courts d’un jour ou moins. Parmi les contrats de moins d’un mois, 85 % correspondent à des réembauches chez le même employeur. Deux raisons justifient cette forte progression : un mode de calcul de l’allocation chômage qui incite à fractionner les contrats, mais aussi des règles de rechargement des droits qui favorisent le travail précaire. Les CDD et l’intérim représentent un déficit de près de 9 milliards d’euros pour l’assurance chômage.
Les droits à l’assurance chômage
Pour bénéficier du chômage, il faut avoir travaillé au moins 4 mois (88 jours) sur les 28 derniers mois. La durée d’indemnisation au cours de laquelle vous pourrez percevoir l’allocation d’aide au retour à l’emploi est proportionnelle à celles de vos derniers emplois, avec une durée maximale de 24 mois, voir 36 mois si vous avez au moins 55 ans. Six mois d’activité donnent donc droit à 6 mois de chômage.
Un système qui permet de gagner plus en restant au chômage
Selon le ministère du Travail, une personne peut gagner de 100 % à plus de 200 % de son salaire moyen quand elle est au chômage. Exemple pour une personne qui a travaillé pendant un an en enchaînant des contrats de 15 jours par mois à 1,5 smic lui faisant gagner chaque mois un salaire net de 880 € environ. Une fois au chômage, son allocation journalière sera calculée sur la base d’un salaire journalier de référence (SJR) avec 180 jours travaillés (12 × 15), qui lui sera versée tous les jours des mois pendant la durée d’indemnisation. Elle percevra donc une allocation nette de 1 200 € pendant les 6 mois de son chômage. Au chômage, cette personne va ainsi gagner plus que lorsqu’elle travaillait conclu le ministère.
Pour comprendre comment on peut arriver à toucher plus au chômage, il faut se plonger dans les règles complexes d’indemnisation. Tout part du SJR, obtenu en divisant la somme des revenus perçus sur les 12 derniers mois par le nombre de jours travaillés, en sachant que l’on retient 5 jours travaillés par semaine civile. Une fois calculé, on en déduit le montant de l’allocation journalière, puis on multiplie cette dernière par le nombre de jours indemnisables (31, 30 ou 28). Ce mode de calcul est plus favorable pour certains contrats fractionnés avec un nombre d’heures journalières importantes, car elles gonflent l’indemnisation.
Un autre salarié payé aussi à 1,5 smic mais travaillant à mi-temps sur les 12 derniers mois touchera moins mensuellement, car son SJR est calculé en divisant par 365 jours travaillés, mais il percevra plus longtemps son allocation (12 mois contre 6 dans le cas précédent).
Pour mettre fin à cette situation, les indemnités chômage seront donc calculées sur le revenu mensuel moyen du travail et non plus sur les seuls jours travaillés comme actuellement. En outre, pour accéder au chômage, il faudra avoir travaillé au moins pendant 6 mois sur les 24 derniers mois. Quant au seuil de rechargement des droits, il passera d’un mois à 6 mois.
► Taxer doublement les entreprises ayant recours aux CDD
Les 7 secteurs concernés par le bonus-malus, dont le secteur de l’hôtellerie-restauration, ont tous un taux de séparation - c’est-à-dire le rapport entre l’effectif de l’entreprise et le nombre d’inscriptions à Pole emploi de salariés ayant travaillé pour elle - supérieur à 150 %. Pour le ministère du Travail, cela signifie que dans ces entreprises emploient, en moyenne, deux personnes en contrat stable pour plus de trois personnes en contrat précaire soit, par exemple, 3 CDD pour 2 CDI, ou plus de 150 intérimaires pour 100 CDI.
C’est pour cela que le Gouvernement veut instaurer un bonus-malus qui fonctionnera de la façon suivante : plus une entreprise aura de salariés qui s’inscrivent à Pôle emploi par rapport à son effectif, plus elle paiera une cotisation chômage importante. À l’inverse, plus une entreprise fera d’effort pour réduire le nombre de personnes qui s’inscrivent à Pôle emploi et moins elle paiera de cotisations. Le taux de la cotisation chômage variera entre 3 et 5 % de la masse salariale, en fonction de la pratique de l’entreprise.
Toutes les inscriptions à Pôle emploi seront prises en compte, quel que soit le motif de la rupture (fin de CDD, fin de mission d’intérim, de licenciement, rupture conventionnelle…). Cela explique pourquoi le taux de séparation est aussi élevé, puisqu'il ne prend pas uniquement en compte les contrats courts. Cette méthode revient à taxer le modèle économique des entreprises des CHR, comme celles dont l’activité est liée au rythme des saisons. C’est une double peine pour le secteur qui souffre d’un important turn-over en raison d’un manque d’attractivité, dû en partie aux conditions de travail (le week-end, les jours fériés et en soirée).
Le Gouvernement prévoit aussi d’instaurer une taxe forfaitaire de 10 € sur les CDD d’usage - appelés contrats d’extra dans les CHR -, pour inciter les entreprises à proposer des contrats d’une semaine ou d’un mois plutôt que de quelques heures par jour. Cette mesure vise principalement le modèle économique des traiteurs organisateurs de réceptions. En revanche, le Gouvernement ne touche pas au régime des intermittents du spectacle régis par les annexes 8 et 10 du régime, qui pourront continuer à user et abuser des CDD d’usage avec une simple majoration supplémentaire de la cotisation patronale de 0,5 % introduite par la convention de mars 2017.
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Publié par Pascale CARBILLET
mardi 25 juin 2019