L'obtention de l'étoile Michelin a amené 20 % de clientèle supplémentaire. Le samedi soir, le restaurant est complet deux mois à l'avance et c'est le plus gros chiffre d'affaires de la semaine. "J'ai bien conscience de prendre un risque, ajoute le chef, mais je suis persuadé que le client s'adaptera. Plusieurs restaurants fonctionnent sur ce modèle à Paris, pourquoi pas à Toulouse ?" Seule la note sera légèrement revue, puisque l'étoilé a décidé d'augmenter ses menus de 0,5 € à 3 €.
Une recette qui fonctionne
Il est vrai que la formule n'est pas nouvelle et a fait ses preuves. Ainsi, à Orléans (Loiret), La Dariole est fermée le samedi soir depuis une dizaine d'années, et le chiffre d'affaires n'en a pas été affecté. "Nous avons changé notre jour de fermeture lors du passage aux 39 heures, pour réduire les charges, explique la responsable Sandrine Pichonnet. Les clients se sont adaptés. Nous sommes complet tous les autres jours de la semaine." Au Canclaux, à Nantes(Loire-Atlantique), les frères Berthaud donnent clairement la priorité à la clientèle du jeudi soir : "Ce sont en général des quadragénaires qui viennent se faire plaisir. Ils ne regardent pas à la dépense. Le samedi, nous avions souvent des clients pressés de manger pour aller ensuite dans les bars ou discothèques. Fermer le samedi a été un vrai choix qualitatif, explique Jean Berthaud. On préfère une clientèle qui corresponde à notre positionnement commercial. Depuis deux ans que nous avons adopté cette formule, on ne regrette rien."
À Lyon (Rhône), Cédric Blin a ouvert Le Bistrot des voraces il y a trois ans. "J'ai tout de suite décidé de fermer le week-end pour pouvoir m'occuper des enfants. Le challenge était de travailler suffisamment la semaine pour rester fermé le week-end. Pari réussi." Heureux en famille, heureux au resto... Même son de cloche chez Éric Hubert, chef de cuisine de Mon bistrot à moi, à Lyon également : "Pas question de changer : nous faisons des journées de treize heures pendant la semaine, mais les équipes apprécient ce rythme."
Paris redécouvre la clientèle du lundi
De plus en plus de belles tables parisiennes sont fermées le samedi soir, à l'instar du double étoilé Akrame (XVIe). "C'est une vraie tendance, affirme Farah Benallal, directrice du restaurant. Nous misons beaucoup sur les déjeuners et dîners du lundi. On reçoit une belle clientèle de restaurateurs qui ne travaillent pas ce jour là. Ils viennent pour tester, déguster. Les autres jours de la semaine fonctionnent aussi très bien. Nous sommes complet trois mois à l'avance le vendredi soir."
"Les mentalités ont changé, explique Guillaume Muller, propriétaire du restaurant Garance (VIIe). J'ai commencé à travailler à 16 ans et je ne comptais pas mes heures. Aujourd'hui, les salariés veulent du temps libre. Si on veut fidéliser son équipe, il faut lui offrir une certaine qualité de vie. Fermer le samedi nous permet aussi de mieux travailler, de mieux anticiper."
Chez David Toutain (VIIe), le carnet de réservation de la semaine ne désemplit pas : "On fonctionne beaucoup avec les entreprises pour des repas d'affaires. C'est un petit luxe de pouvoir fermer le samedi soir. J'ai tenu à privilégier la vie personnelle de mes collaborateurs. C'est important de trouver un équilibre dans ce métier. Le lieu est également capital et c'est sans doute plus facile de fermer le samedi soir à Paris que dans d'autres villes."
Pour une meilleure articulation entre vie professionnelle et vie privée ou par stratégie commerciale, les professionnels qui ont choisi de fermer le samedi soir, à Paris comme en province, ne le regrettent généralement pas.
Publié par Dorisse PRADAL
samedi 6 juin 2015