"Mon arrière-grand-mère avait un hôtel à Laguiole. Ma grand-mère a repris le flambeau. Mon père est né dans une chambre d'hôtel. Mes parents ont tenu un café à Saint-Ouen, puis un petit hôtel à Puteaux." Philippe Vaurs a grandi dans cet univers. Difficile de s'en échapper. Et ce d'autant que "je n'étais pas un élève brillant à l'école. Pour évoluer, il fallait donc que je m'appuie sur la structure familiale". Ce qu'il a fait très tôt. "Enfant, j'aidais déjà mes parents dans leur café." Mais le déclic a lieu lorsque ses parents lui ont laissé les clefs de leur hôtel à Puteaux durant tout un été : "J'ai adoré les remplacer". C'était décidé : il allait devenir hôtelier. "Je voulais d'emblée mon propre hôtel".
Racheter un immeuble squatté
"J'avais créé mon modèle d'hôtel", explique-t-il. Philippe Vaurs n'a alors que son bac en poche, ayant raté son BTS à l'Ecole hôtelière de Paris. Mais déjà passionné, audacieux et entrepreneur, il parvient à convaincre le banquier de ses parents de le suivre lorsqu'en 1984, il achète pour 350 000 francs "un immeuble squatté par une centaine de personnes, à Puteaux. Ma première mission a été de reloger ces personnes. Puis, j'ai engagé une vague de travaux et l'hôtel a ouvert ses portes un an après." Il y est présent alors sept jours sur sept, du matin au soir. Avec l'aide de sa mère, il s'occupe de tout, sauf des tâches ménagères. "L'hôtel a été très vite rentable", se souvient-il. Si bien que lorsque l'immeuble d'en face est mis en vente, il emprunte - à un taux de 15 % - pour le racheter et créer un deuxième hôtel, pour éviter qu'un concurrent ne vienne lui faire de l'ombre. Conscient aujourd'hui du risque pris à l'époque, il ne regrette rien. "Cette deuxième affaire a aussi bien marché que la première."
"Chaque projet est une remise en question"
De la fin des années 1980 jusqu'aux années 2000, Philippe Vaurs rachète d'autres hôtels, investir, rénover, revendre et même créer, avec Christophe Sauvage, la chaîne volontaire Élysées West Hotels, riche de 135 établissements. Lorsque celle-ci est revendue en 2008 à Hotusa, le duo réfléchit au "projet idéal au regard de notre expérience". En 2009, ils fondent Elegancia Hotels. Ce groupe se spécialise alors dans la réalisation de projets hôteliers, de la conception au montage d'opérations, en passant par la maîtrise d'ouvrage, la gestion et la commercialisation. "Chaque projet est une remise en question, une façon d'explorer d'autres thèmes, d'autres univers, en association avec des architectes et des architectes d'intérieur qui partagent notre état d'esprit." C'est ainsi que sont nés une douzaine d'établissements parisiens, où décoration et design s'affranchissent des codes et "bousculent les habitudes", comme le Five Hotel - avec une suite dont le lit est en lévitation -, le Seven Hotel ou encore l'hôtel Crayon rouge. Pour Philippe Vaurs "créer de l'émotion" et se démarquer des autres est une priorité. Il parle d'ailleurs d'hôtels singuliers.
Entre 200 et 300 salariés "coachés et motivés"
"Aujourd'hui, je travaille avec trois associés, Christophe Sauvage, Alexandre Cayla et Alexandre Loisnard-Goyeau. Le groupe Elegancia compte entre 200 et 300 salariés - coachés et motivés - et sans l'accompagnement du Crédit Agricole de l'Aveyron, nous n'en serions pas là", explique Philippe Vaurs. D'ici à 2020, il souhaite tripler le réseau de ses hôtels en mandat de gestion. En attendant, il prépare l'ouverture de trois nouveaux établissements à Paris, peaufine la création d'un bateau-hôtel sur la Seine, termine un projet d'une vingtaine de bungalows de luxe au Brésil et travaille, avec le groupe Novaxia, sur le dossier de l'hôtel qui ouvrira en 2019 au dernier étage de la Poste de la rue du Louvre.
Ironie du sort : s'il a échoué à son BTS à Médéric, cette année il a parrainé une promotion de BTS dans ce même lycée hôtelier. Son message aux jeunes : "Le monde n'attend pas. Il faut s'adapter, prendre sa vie en main, se battre et tout oser entre 20 et 35 ans."
Publié par Anne EVEILLARD