du 30 mars 2006 |
VIE PROFESSIONNELLE |
PROCHAIN CONGRÈS DE LA FAGIHT À ANNECY
Jacques Jond : "Chez nous, on modernise des outils déjà modernes"
Les 5 et 6 avril, la Fagiht organise son 14e congrès national. Ce syndicat essentiellement dédié à l'hôtellerie classée de tourisme défend sa propre conception du syndicalisme patronal. Pour son président Jacques Jond, ses membres représentent une hôtellerie qui ne cesse d'investir. Micro.
Propos recueillis par Sylvie Soubes
Jacques Jond : "Sur la modernité du secteur, je voudrais bien que les médias ne transposent plus ce misérabilisme ." |
L'Hôtellerie
Restauration : Pourriez-vous
résumer la Fagiht aujourd'hui ?
Jacques Jond
: La Fagiht est née il y a plus de 3 décennies. Les choix fondamentaux
de ses membres fondateurs n'ont jamais varié depuis. Je voudrais préciser
que la scission dont elle émanait n'a jamais été une question d'hommes
ni de circonstances, comme je l'entends encore dire aujourd'hui, mais bien une conception
différente du syndicalisme patronal symbolisé par cette formule : l'aspect
libéral de l'hôtellerie n'autorise ni la facilité pour soi ni la
docilité vis-à-vis de l'État. En sachant que notre particularité,
c'est l'hôtellerie classée de tourisme qui est une hôtellerie tenue
essentiellement par des indépendants. Si nous aussi nous réclamons la
TVA à 5,5 %, ce dossier ne doit pas occulter les autres. La profession la
plus en difficulté actuellement, c'est l'hôtellerie avec restauration
et bar. Les chefs d'entreprise qui sont à la tête de ces établissements
doivent faire face aux problèmes de personnel, à des investissements
lourds… Ce sont eux que nous représentons.
Quelle est votre implantation ?
Nous sommes nationaux même si
notre siège, historiquement, ce sont les Alpes du Nord, avec son hôtellerie
thermale et estivale de moyenne montagne ou de sports d'hiver. La Fagiht représente
80 % de l'hôtellerie de sports d'hiver, et elle est implantée dans 20
départements. C'est une hôtellerie qui continue à fournir le parc
le plus moderne qui soit car les conditions d'exploitation imposent des investissements
aussi importants que dans les grandes métropoles. Avec, il faut le préciser,
seulement 6 mois de fréquentation. Vous comprendrez dès lors que nous
ne raisonnons pas en termes de département mais en termes d'entreprises.
Quels seront les grands thèmes
abordés lors de ce 14e congrès ?
Nous allons présenter les derniers
chiffres de l'étude que nous menons depuis plusieurs mois avec la direction
du tourisme sur l'hôtellerie saisonnière, qui connaît un grave
recul. Comme je viens de vous le dire, elle doit toujours investir, et les saisons
durent de 4 à 5 mois en moyenne selon l'altitude. Et puis, les clients de
l'hôtellerie de vacances dépensent autrement qu'en hôtellerie d'affaires.
Les budgets ne sont pas les mêmes. On y va en famille, les notes ne sont pas
remboursées… Le thermalisme se porte un peu moins mal parce qu'une partie de son activité s'inscrit dans les
soins remboursables. Je vais demander à Renaud Dutreil ce qu'il compte faire
pour l'hôtellerie indépendante saisonnière. Ce sont des atouts pour
les régions et les sites. Ces établissements participent à l'aménagement
du territoire, et leurs patrons sont la plupart du temps propriétaires des
murs et des fonds. Ce sont leurs propres capitaux qu'ils mettent en jeu, et les
retours sur investissement sont plus longs. Je regrette que le gouvernement ne veuille
pas, pour le moment, entendre parler des taux d'intérêt bonifiés.
Quand je pense qu'on ose nous dire que les taux en France sont autour de 2 %, alors
qu'ils sont entre 5 et 7 %, et sur 15 ans maximum dans notre secteur. En ayant supprimé
le Fonds d'investissement pour le développement économique et social (Fides)
et les prêts bonifiés, l'État a porté des coups mortels aux
entreprises saisonnières. J'ai été plus de 2 heures et demi en tête-à-tête
avec le ministre Renaud Dutreil, qui préconise notamment une solution de défiscalisation
pour ceux qui voudraient investir dans notre secteur. Le problème, c'est que
les investisseurs, en général, investissent pour sauver des fonds de l'impôt,
et que ceux-ci prennent de la valeur. Vont-ils vouloir investir chez nous ?
Nous rencontrons de nombreux problèmes. Les
2 jours de repos obligatoire par semaine pour les salariés imposent des charges
supplémentaires aux établissements saisonniers, puisqu'il faut impérativement
des volants de remplacement. Ce qui rend ce secteur encore plus vulnérable.
Renaud Dutreil l'a très bien compris. Ajoutez à cela que l'hôtellerie
saisonnière ne peut pas faire appel aux apprentis.
Pourquoi Annecy ? Et qu'attendez-vous
de ce rendez-vous 2006 ?
Nous avons choisi Annecy parce que
c'est un des adhérents les plus symboliques. C'est un congrès sur 2 jours,
avec le renouvellement en partie du conseil d'administration. Il y aura 2 grandes
tables rondes. Le 1er jour, je voudrais aussi obtenir les réactions
de la salle sur les propositions de défiscalisation, dont nous parlera le lendemain
Renaud Dutreil. Je vais également faire la demande d'une circulaire officielle
pour qu'on s'attache davantage à l'esprit qu'à la lettre. Les cow-boys
de l'administration doivent être muselés. Qu'ils fassent leur métier
oui, avec des
oeillères non.
Et puis qu'on cesse d'associer nos établissements à des lieux publics…
Si nous étions des lieux publics, ce serait à l'État de payer.
En matière de paracommercialisme, je tiens à rappeler que nous n'avons
rien contre les chambres et les tables d'hôte, si elles étaient soumises
aux mêmes taxes et mêmes impôts que nous. Sur le plan social,
on va demander qu'il y ait des réductions de charges sociales spécifiques
à l'industrie hôtelière. Que l'enveloppe des aides Raffarin-Sarkozy
soit utilisée à ce niveau, et pas comme elle est aujourd'hui distribuée.
Enfin, sur la modernité du secteur, je voudrais bien que les médias ne
transposent plus ce misérabilisme. Quand on se tourne vers la modernité,
cela veut dire qu'on n'est pas moderne. Chez nous, on modernise
des outils déjà modernes.
Puisque la grogne anti-CPE fait
la une de la presse, quelle est la position de la Fagiht sur cette mesure ?
Il est évident que le CPE est
mal expliqué, mal compris. Les gens dans la rue disent qu'ils ne veulent pas
de la précarité. Or, le CPE est un système qui est là pour
limiter la précarité. À l'évidence, c'est un moyen parmi d'autres
pour essayer de réduire le chômage. Bien sûr, ce moyen tout seul
est tout à fait insuffisant. Peut-il réussir ? On ne peut pas le savoir
tant qu'il ne sera pas appliqué. zzz74v4v
Fagiht
221 av. de Lyon
BP 448 - 73004 Chambéry
Tél. : 04 79 69 26 18
Programme
du 14e congrès de la Fagiht *
Lieu
Impérial
Palace à Nancy
5 avril
Élections aux conseils
d'administration et de direction.
Le point avec les adhérents sur les grands
dossiers en cours.
6 avril
Tables rondes : 'Social, où en est
la profession ?' avec la participation de Pascale
Carbillet, de L'Hôtellerie
Restauration ; 'Hôtellerie indépendante et saisonnière',
son devenir et la superposition
des contraintes. Quels remèdes ? Interpellation du gouvernement.
L'après-midi, assemblée plénière
en présence de Renaud Dutreil, ministre
des PME, du Commerce, de l'Artisanat,
des Professions libérales
et de la Consommation, et de Frédéric Pierret,
directeur national du Tourisme.
* Fédération autonome générale de l'industrie hôtelière touristique.
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L'Hôtellerie Restauration n° 2970 Hebdo 30 mars 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE