du 16 novembre 2006 |
JURIDIQUE |
UN FORMALISME JURIDIQUE INDISPENSABLE
BIEN RÉALISER LA CESSION DE DROIT AU BAIL
L'exploitant d'un fonds de commerce peut souhaiter le vendre, ce qui entraînera la cession du droit au bail. Si cette dernière ne peut être purement et simplement interdite, la cession du bail peut être malgré tout soumise à un certain formalisme.
Pour
pouvoir créer ou développer un commerce, c'est une évidence, il faut
un local ; mais il faut aussi pouvoir le quitter pour s'agrandir, par exemple. Alors,
comment peut-on acquérir un local commercial, comment peut-on le quitter ?
S'interroger sur le droit au bail, c'est essayer de déterminer quels sont les
droits du bailleur, du preneur et du repreneur lors de la cession et quelles en
sont les limites puisque les intérêts du bailleur (celui d'avoir un droit
de regard sur une opération qui aboutit à un changement de débiteur)
et celui du preneur (celui de pouvoir céder son bail pour pouvoir s'adapter)
sont antagonistes.
Acquérir la jouissance d'un local commercial,
et donc le droit au bail qui l'accompagne, peut se faire soit en obtenant le transfert
de jouissance par la cession du bail, soit en opérant un transfert de jouissance
du droit au bail dans le cadre de l'acquisition d'un fonds de commerce.
Le preneur a donc 2 possibilités
pour céder son bail : soit il cède uniquement son droit au bail ; soit
il cède son bail en cédant le fonds de commerce, le droit au bail étant
un des éléments permettant de caractériser le fonds. Pour sa part,
l'acquéreur étant obligé soit d'acquérir le seul bail, soit
l'intégralité du fonds de commerce.
Il est donc important de savoir ce
que l'on peut faire et quelle solution choisir.
Une liberté relative
de céder son bail
En principe, si l'on s'en
tient aux dispositions de l'article 1717 du Code civil, la cession du droit au bail
est libre, mais cette liberté est en réalité 'une liberté surveillée'.
Elle peut être soumise à l'agrément préalable du bailleur.
Mais attention, dans ce cas, un refus abusif du propriétaire peut être
sanctionné, car on considère alors qu'il ne s'agit plus d'un droit mais
d'un abus de droit. La cession du bail peut être soumise à un formalisme
particulier (acte notarié). Il se peut -et c'est en général très
fréquent - que la cession du droit au bail soit purement et simplement interdite.
Mais cela suppose une restriction
considérable à la liberté du commerce et à la liberté
d'entreprendre. C'est pourquoi le législateur n'a pas voulu qu'un propriétaire
puisse interdire, dans tous les cas, la cession du droit au bail. C'est pourquoi
cette interdiction ne peut être générale.
Ainsi, lorsque le bail est cédé
dans le cadre d'une cession de fonds de commerce, celle-ci ne peut être interdite
à l'acquéreur de son fonds ou de son entreprise (article L.145-16, alinéa
1er du Code de commerce), schématiquement donc à 'un successeur'
*.
De cette différence et des difficultés
qui peuvent naître de l'interdiction de céder le bail seul, certains
sont tentés de 'déguiser' la cession du droit au bail en cession de fonds
de commerce. Il faut éviter ce genre de pratique car si le propriétaire
s'aperçoit de cette supercherie, l'acte peut être annulé. En clair,
cela signifie que celui qui a payé pour entrer dans les lieux peut être
condamné à partir ! Ainsi a-t-il été jugé qu'une cession
de fonds de commerce inexploité depuis 2 ans n'était pas une cession de
fonds, mais une cession de bail déguisée, puisque l'un des éléments
constitutifs du fonds de commerce, à savoir la clientèle, avait disparu.
Bien regarder les clauses
du bail avant
la cession
Il faut donc être
très attentif lorsque l'on cède, ou lorsque l'on acquiert son bail aux
clauses qui figurent dans l'acte, car elles forment l'expression de la volonté
des parties, et à ce titre, elles s'imposent au preneur comme au bailleur,
et bien sûr, au cessionnaire (ce dernier étant celui qui va acquérir
le bail ou le fonds).
Lorsqu'il s'agit d'une cession
de droit au bail, elle doit être notifiée au bailleur. On considère
en effet qu'elle a la qualification d'une cession de créance. Il s'agit d'un
acte extrajudiciaire (fait par un huissier) qui informe le bailleur des dispositions
essentielles de l'acte (article 1690 du Code civil). Notons que cette formalité
peut être remplacée par l'acceptation de la cession par le bailleur dans
un acte authentique (c'est-à-dire passé devant un notaire).
Lorsqu'il s'agit d'une cession de fonds
dans laquelle, bien évidemment, le bail est cédé, il faut également
être attentif. Ainsi, si le bail prévoit que lors de la cession, le propriétaire
doit être averti au préalable et qu'il doit concourir à l'acte,
il faudra tenir compte de ces deux impératifs car, à défaut, le
propriétaire pourra demander la nullité de la cession.
Enfin, qu'il s'agisse d'une cession
de droit au bail ou d'une cession de bail dans le cadre d'une cession d'un fonds
de commerce, souvent, le bail initial prévoit que le cédant (c'est-à-dire
celui qui cède le bail ou le fonds) demeurera solidaire des loyers impayés
par le cessionnaire. C'est-à-dire qu'il demeurera responsable du paiement
des loyers jusqu'à l'expiration du bail au cours duquel a eu lieu la cession,
et ne joue plus en cas de renouvellement du bail au profit du cessionnaire. Cela
signifie donc que le cédant y est tenu, jusqu'à la fin de l'engagement
qu'il avait initialement contracté. Il faut savoir que la durée de la
solidarité peut se négocier, mais qu'une diminution de sa durée ne
peut être imposée.
Les communes bénéficient
d'un droit de préemption
Mais attention, cession
de droit au bail ou cession de bail dans le cadre d'une cession de fonds de
commerce sont désormais soumises au droit de préemption urbain des communes
(articles L.213-4 à L.213-7 du Code de l'urbanisme). Dès lors qu'une ville a
décidé de créer un 'périmètre de sauvegarde du commerce ou de l'artisanat de
proximité', le cédant (c'est-à-dire le titulaire du bail) doit au préalable
effectuer une déclaration. Cette déclaration doit comporter le prix et les
conditions de la cession. La commune a 2 mois pour faire connaître sa décision ;
aucune transaction ne peut être réalisée avant la fin de cette période. Cette
formalité est impérative, car l'absence de déclaration entraîne la nullité de la
vente qui peut être poursuivie pendant 5 ans.
Dina
Topeza, avocat au barreau de Paris
* Précision : lorsqu'il y a cession de bail par apport partiel d'actif ou fusion ou scission de société, ce qui est indiqué dans cet article n'est pas valable. zzz62 FC0607
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