À la demande du Gouvernement, Accor et le bureau Veritas ont lancé une démarche visant à définir les standards sanitaires applicables à tous les hôtels, de chaînes et indépendants. Cette collaboration a donné lieu à l’élaboration d’un protocole, avec les quatre organisations professionnelles d’employeurs représentatives du secteur CHR. Ce protocole sanitaire, validé par les directions générales de la Santé et du Travail et arrêté par le ministère du Travail, a été publié le 31 mai, après consultation des syndicats de salariés. Il est d’application immédiate et obligatoire dans les établissements CHR, et engage les exploitants. Son objectif est triple : rassurer les salariés, rassurer les clients et standardiser les pratiques. Il s’accompagne de fiches métiers qui rassemblent les consignes et mesures de protections selon le poste occupé.
Une fiche a été élaborée pour les spas, regroupés avec l’esthétique et les espaces forme. Néanmoins, celle-ci laisse la place à l’interprétation et chaque établissement pourra être plus ou moins rigoureux dans l’application des recommandations. De nombreux centres esthétiques ont déjà rouvert depuis le 11 mai, mais les zones humides posent nécessairement davantage de questions que les zones sèches.
Pour les zones humides, la fiche sanitaire préconise :
- la mise en place d’un circuit pour les clients obligeant un passage aux douches savonnées et aux pédiluves ;
- un accès réglementé aux lieux de regroupement - sauna, bain à remous - pour y limiter le nombre de personnes, mais sans toutefois en préciser le nombre ;
- la fermeture, dans un premier temps (mais sans en préciser la durée) des hammams et l’interdiction d’utiliser les cols de cygnes (ou toute activité avec des projections).
La fiche sanitaire recommande également la distanciation d’un mètre minimum entre les appareils de cardio-training et les transats en zone de repos.
Une capacité d’accueil limitée
Le respect de ces préconisations aura pour conséquence de limiter la capacité d’accueil des zones humides et des espaces collectifs et donc :
- soit de limiter la fréquentation du spa et donc les recettes ;
- soit de compenser cette perte de fréquentation par une augmentation des soins secs (soins esthétiques, modelages…), et donc des charges de personnel.
Dans l’un ou l’autre cas de figure, des problèmes de rentabilité risquent de se poser. D’autant plus que les charges (de personnel et de consommables) pour l’entretien et la désinfection seront accrues : la fiche sanitaire recommande de désinfecter toutes les surfaces, poste d’accueil et cabines de soins, les outils et contenants, d’augmenter le nombre de désinfections des places de bassins, du sauna, du hammam (si ouvert), des sols dans les salles de gym,… de mettre à disposition du personnel du gel hydro-alcoolique, des masques ou visières, des gants,… ainsi que des produits désinfectants ou lingettes pour les clients.
Une solution pourrait être de réévaluer les tarifs, mais les clients l’accepteront-ils ? C’est peu probable. Autres difficultés auxquels risquent de se heurter les hôteliers, la réticence des salariés à faire évoluer leurs missions vers plus de soins, plus d’entretien et de désinfection (des tâches fatigantes et contraignantes). Sans compter le fait que certains d’entre eux ne pourront peut-être pas reprendre leur poste en raison de la fermeture partielle des écoles.
Rassurer la clientèle
Et les clients dans tout ça ? Auront-ils envie de revenir dans les spas, un lieu confiné où la promiscuité est relativement importante ? La question reste en suspens. Les avis sur le sujet dépendront de la sensibilité de chacun, de la connaissance et de la confiance que les clients accordent au spa visé, de la capacité des hôteliers à les rassurer sur les conditions sanitaires, sans pour autant rendre l’accès au spa trop aseptisé. Il est encore trop tôt pour connaître la motivation des clients et les situations diffèrent d’un spa à l’autre en fonction de sa localisation, de sa taille, de la part de clients habitués, des efforts entrepris par l’exploitant…
Dans ce contexte complexe, la réouverture des spas hôteliers pose de nombreuses questions qui ne peuvent obtenir de réponses toutes faites. Ce protocole sanitaire pourrait néanmoins, au-delà des recommandations en matière de désinfection, initier la construction d’un cadre et contraindre à une certaine rigueur en matière de nettoyage et d’entretien des spas, ce qui n’est pas toujours le cas et constituerait une valeur ajoutée pour la profession.
Publié par Perrine Edelman, Coach Omnium
mercredi 24 juin 2020