Le bateau s'éloigne majestueusement de la côte de Khasab, petite ville portuaire du Sultanat d'Oman blottie au milieu des montagnes de Musandam. Les 2 581 passagers ont regagné leurs cabines, boivent un verre dans l'un des 12 bars, se détendent dans les salons ou profitent des dernières lueurs du soleil sur les pontons avant le dîner. Plus de 900 membres d'équipage leur sont totalement dévoués depuis le départ de Dubaï, trois jours plus tôt. L'organisation est efficace et bien rodée, malgré un personnel venu des quatre coins du monde. "Il faut avant tout créer un esprit d'équipe", confie Umberto Iacomino, Restaurant Manager, à la tête des 234 personnes qui assurent le service en salle dans les cinq restaurants du navire. Chaque soir à 18 heures, juste avant le premier service, il les rassemble dans l'une des deux salles à manger principales (1 850 places au total) pour faire un point et donner les dernières consignes. Tous sont attentifs au travail à réaliser, dépassant les barrières linguistiques et culturelles d'une douzaine de nationalités. Avec près de quarante ans d'expérience, Umberto Iacomino, formé à l'école hôtelière de Glion (Suisse), a su relever le défi, aidé de sept assistants maîtres d'hôtel, et d'un responsable de buffet. "Certains sont là depuis plusieurs années, généralement pour des contrats de huit mois renouvelables, entre lesquels ils retournent chez eux." La plupart ont travaillé à terre dans des restaurants avant de choisir ce travail en mer. Leur motivation ? "Le voyage, mais surtout le salaire, qui me permet d'apporter un revenu à ma famille", confie Emilio, originaire d'Indonésie.
Un sens de l'organisation
On retrouve le même esprit en cuisine, où le chef exécutif Luigi Leontini dirige une équipe de 170 personnes, répartie sur 13 postes (rôtisserie, légumes, préparation…). L'organisation est carrée et chacun semble connaître sa tâche avec précision. "Tous les matins, à 8 heures, j'organise une réunion avec mes 13 premiers cuisiniers, responsable de chacun des postes en cuisine", précise le Sicilien qui est rentré chez Costa Croisières en 1978, après plusieurs contrats, dont trois ans dans un Sheraton en Sicile. Chef exécutif depuis 1999, spécialiste en poisson et cuisine méditerranéenne, il doit composer avec les menus décidés par la compagnie. Il les adapte "autant que possible", en fonction "de la typologie des passagers et après accord du Corporate Chef basé à Gênes". Le chef italien commande également en cours de route des produits frais qui viendront agrémenter les menus, comme ces 600 kg de crevettes fraîches embarquées à l'escale d'Abu Dhabi. Elles seront "nettoyées une à une, avant d'être grillées au four et servies avec une sauce blanche au cherry" pour le 'dîner d'adieu', la veille du retour à Dubaï. L'ensemble des produits secs vient d'Italie par bateau, toutes les deux semaines par container, juste avant le départ des sept jours de cette croisière 'Mille et une nuits'. "Avec jusqu'à 3 800 passagers, le travail est très différent d'un hôtel classique", explique Luigi Leontini. Il peut compter également à bord sur cinq superviseurs qui le représentent dans chacun des cinq restaurants du navire, dont un gastronomique, le Samsara (40 places), proposé aux passagers sur réservation, en option payante. "Il possède sa propre cuisine et un menu spécifique", précise le chef exécutif.
Des défis en plus
Deuxième personnage clé du bateau après le commandant, le directeur d'hôtel Alessio Laiena a la responsabilité des 900 membres d'équipage (sur un total de près de 1 200 personnes) chargés de l'accueil, des relations clients, de l'administration, des animations, du service en cabine ou en salle, et de la restauration à bord. "C'est comme gérer un complexe hôtelier, mais avec beaucoup de défis en plus !", commente le Napolitain. La quasi-totalité des fruits et légumes frais doit, par exemple, être embarquée pour la semaine dès le départ de Dubaï, "car il est ensuite plus difficile de se fournir dans les autres ports". Il faut s'adapter à l'offre : plus de deux tonnes d'ananas sont ainsi monté à bord au départ de la croisière. Cet italien de 31 ans est devenu en novembre 2011 le plus jeune directeur d'hôtel de la flotte Costa. Entré chez le croisiériste en 2005 comme directeur des services, il avait travaillé auparavant pour d'autres compagnies et dans un hôtel-restaurant à New York. Sept personnes sont directement sous ses ordres, dont le directeur des services qui a la charge de l'ensemble du service hôtelier, de la restauration au service en cabine. Près de 80 Cabins Stewards s'occupent de ces dernières. Chacun peut avoir jusqu'à 22 chambres sous sa responsabilité, suivant le nombre de passagers. "C'est un travail difficile, mais j'aime voyager et j'aime le contact avec les gens", confie Christopher, originaire de Manille, chez Costa Croisières depuis 9 ans. Il reconnaît que le salaire reste tout de même l'une de ses principales motivations.
Publié par Patrick CROS