“L’IA est encore sous-utilisée en restauration, mais le potentiel est énorme”, juge Nicolas Nouchi, directeur Insights de CHD Expert - Datassential. Des solutions permettent ainsi d’optimiser le coût matière, tout en limitant le gaspillage alimentaire : elles peuvent prédire les ventes futures en prenant en compte des facteurs externes (météo, vacances, événements sportifs…) et générer automatiquement les commandes fournisseurs. Elles référencent aussi les grammages d’ingrédients pour chaque recette - ce qui permet aux restaurateurs d’éviter surstockage inutile ou ruptures de stock - et donnent accès en temps réel au coût matière et à la marge brute réelle. Inpulse, pionnier du secteur, compte aujourd’hui plus de 1 500 restaurants clients. “Nos clients peuvent gagner de 2 à 5 points de marge, même dans un contexte inflationniste. Côté Sushi a, par exemple, réduit ses pertes de saumon de 70 %, et vu sa marge brute augmenter de 800 000 € en un an”, déclare Brice Konda, co-fondateur d’Inpulse. De son côté, Misba Chaudhary, en charge de la partie juridique chez Fullsoon, évalue à “96 % le taux de précision de la solution, 20 heures par mois économisées pour la gestion d’un restaurant, et 1 000 € de gaspillage alimentaire évités mensuellement pour un restaurant de 100-150 couverts”.
Des systèmes de vente intelligents
Tout comme Spotify ou YouTube suggèrent du contenu personnalisé en fonction des préférences d’un utilisateur, les systèmes de vente intelligents sont, quant à eux, capables de doper les ventes : via des bornes de commande, des applications ou tablettes disponibles à table, ils proposent des items de menus aux clients, en se basant sur l’analyse de leur comportement, sur les tendances du moment ou même en fonction de la météo. Pour Nicolas Nouchi, “l’IA représente un vrai gain de temps, extrêmement utile notamment pour la prise de commande ou le paiement dans des restaurants du quotidien ou le soir pour les happy hours. Elle permet au restaurateur de se concentrer sur des tâches à plus grande valeur ajoutée. Du côté des serveurs, cela ferait évoluer le métier, sans retirer l’aspect humain et les moments d’échange ”.
Les chaînes américaines testent le commerce vocal
Autres pistes : les chatbots, qui peuvent répondre instantanément aux questions les plus fréquentes et prendre des réservations, ou encore le commerce vocal, en plein essor. Selon GlobalWebIndex, une étude menée à l’échelle mondiale estime que plus de 25 % des personnes utilisent les fonctionnalités vocales de leur téléphone intelligent. Aux États-Unis, plusieurs chaînes de restauration rapide (Taco Bell, Popeyes, Wendy’s…) expérimentent des robots vocaux et conversationnels dans leurs drives, afin d’améliorer la précision des commandes, de réduire les temps d’attente et d'augmenter les ventes.
ChatGPT, vraie boîte à outils
ChatGPT est, selon Nicolas Nouchi, une précieuse boîte à outils : “Avec ChatGPT, un restaurateur peut constituer son menu de A à Z. S’il l’informe bien sur son type de restaurant et sa clientèle, ChatGPT est capable de lui donner de nouvelles recettes ou de pimper une recette classique comme la blanquette de veau. Cet outil peut même l’aider à construire son site internet ou à améliorer son référencement.”
Les robots n’ont pas encore fait leurs preuves
Quelques essais ont également été faits en matière de robotisation. Des robots serveurs ont été expérimentés en Asie, aux États-Unis ou encore en France. “Des gadgets, plutôt qu’une réelle valeur ajoutée”, estime Nicolas Nouchi. En cuisine, l’aventure du robot pizzaiolo français Pazzi a rapidement tourné court, tandis que le robot britannique Moley, capable de reproduire des recettes de chefs étoilés grâce à un logiciel de reconnaissance d’image et des bras intégrés, reste fort coûteux. La livraison par drone, quant à elle, reste quasi-inenvisageable en France, la loi interdisant le vol de ces robots “au-dessus de l’espace public en agglomération”.
Publié par Violaine BRISSART
jeudi 22 juin 2023