L'Hôtellerie Restauration : Avant d'aborder le sujet du congrès, je voudrais connaître votre point de vue : la profession a-t-elle été éclaboussée par le scandale de la viande de cheval ?
Gérard Guy : La véritable question, c'est : qu'est-ce qu'il y a dans nos assiettes ? Il y aujourd'hui nombre de propositions mais elles ne sont pas en adéquation avec le client ou avec la réalité du terrain. Il va falloir, dans ce dossier, faire preuve de beaucoup de logique et de bon sens. Un équilibre doit être trouvé. Il faut remettre de l'ordre dans les appellations. Oui, qu'est-ce qu'un restaurant ? Dire d'une chaîne de hamburgers que c'est le plus grand restaurant du monde est une hérésie. Et il ne faut pas non plus monter les uns contre les autres. Il faut une clarification de l'offre vis-à-vis du consommateur. Prenons l'exemple de la mode : quand vous allez dans certaines enseignes, vous savez parfaitement que ce n'est pas de la haute couture !
Nous traversons actuellement une crise économique et vous avez intitulé ce congrès 'Faire face'. Dans quelle mesure ?
L'important est de savoir comment nos établissements vont pouvoir traverser la crise. D'où ce titre, effectivement, 'Faire face'. Aujourd'hui, en province, la crise est réelle et sérieuse. Les professionnels affichent des résultats en baisse de 10 % à 40 % dans certains endroits. La morosité est générale. Une crise est intervenue fin 2008. En 2011, nous avons cru que nous nous en étions sortis et là, une lame de fond nous frappe de plein fouet. On peut parler de catastrophe dans l'hôtellerie et la restauration. Il y a beaucoup de paramètres à ajuster ou modifier. Nous avons - et j'insiste sur ce problème - une législation qui n'est plus du tout adaptée à notre environnement économique. Nous achetons les murs sur quinze ans alors qu'il faudrait pouvoir le faire sur vingt-cinq ans. Les fonds sont amortis sur sept à dix ans et il faudrait qu'ils le soient sur douze ou quinze ans pour ne pas être asphyxié. Quant aux lois sur la sécurité, l'accessibilité, ce sont de vastes sujets. Près de 4 000 hôtels vont disparaître. Il faut cesser de demander aux petits établissements la même chose qu'aux grands. Nous sommes dans des configurations complètement différentes.
Plusieurs thématiques seront abordées lors des tables rondes. Pouvez-vous nous en livrer les grandes lignes ?
Avec la première table ronde, nous souhaitons apporter des réponses concrètes aux besoins de financement, qu'ils concernent l'acquisition, les transformations, les aménagements, les mises aux normes, tous ces problèmes importants qui conditionnent le développement et l'avenir des établissements. La deuxième est intitulée : 'Faire face à l'environnement'. Nous allons tenter, grâce à nos invités, qui sont des experts reconnus comme Philippe François, président d'Ecorismo, et Magali Frontero, dirigeante d'Ecophyse, de répondre à cette question : comment contribuer efficacement au changement climatique, à la réduction de pollutions, à l'optimisation de la biodiversité… tout en permettant à l'entreprise d'augmenter ses profits à partir de solutions pratiques et dans la perspective du développement durable.
Les difficultés administratives seront aussi évoquées, mais de manière un peu particulière ?
Cette fois, nous allons revenir à un principe de jeu de rôle, que nous avons déjà pratiqué lors d'un autre congrès. Nous allons mettre en scène des situations de contrôle de l'administration en matière fiscale, sociale et d'hygiène. La conduite à tenir, les moyens de défense et de recours seront abordés à la lumière des réflexions d'un magistrat du tribunal administratif, Bertrand Riou. La dernière table ronde sera, quant à elle, consacrée aux nouvelles demandes de la clientèle des restaurants et des bars. Nous entendons mettre en lumière les différentes formes de restauration, commerciale et gastronomique et leur complémentarité. Il serait absurde de les opposer, toutefois, nous devons tous tirer des leçons du récent scandale de la viande de cheval. Les restaurateurs sont partie prenante de la chaîne alimentaire et ils ont plus que jamais une obligation de vérité, de transparence et de traçabilité à l'égard des consommateurs.
Faire le pari de l'avenir n'est pas facile aujourd'hui pour les indépendants que vous représentez…
Nous voulons, lors de ce 43e congrès, tenir un langage de vérité, rappelant nos droits mais aussi nos devoirs. Un langage qui appelle nos adhérents à un souci d'éthique et de responsabilité, quelle que soit leur activité. Ce congrès doit être également un lieu de réflexion, de partage et d'actions. Se mobiliser contre la toute puissance de l'administration, contre des volontés politiques affichées en termes de réglementation et de fiscalité : trop, c'est trop ! Nous, petits exploitants, sommes très loin des 35 heures. Les responsabilités sont de plus en plus grandes, les risques de plus en plus importants et nous sommes dans un manque quasi-total de visibilité. Il est scandaleux qu'après une vie de travail et de prise de risques, certains d'entre nous ne bénéficieront que de 500 € pour vivre parce qu'on ne leur aura pas laissé de marge suffisante pour cotiser, quand un salarié payé au smic pourra espérer retirer 1 000 € par mois.
Publié par Propos recueillis par Sylvie Soubes