Arrhes, acomptes, prépaiement, empreinte bancaire… Les hôteliers ont développé toute une batterie de solutions, afin de dissuader les clients de leur faire faux bond. Chacun sa méthode. A l’Hostellerie du Chapeau rouge, à Dijon, le prépaiement est réservé aux groupes, tandis qu’une empreinte bancaire est demandée aux voyageurs individuels. Dans les établissements du groupe Starwood, il suffit de donner un numéro de carte bancaire pour valider sa réservation. Les annulations sont sans frais jusqu'à 18 heures, la veille de la date prévue d'arrivée. Mais certaines offres promotionnelles prévoient un prépaiement non remboursable. Avec le développement de l’e-commerce et des OTA (des agences de voyage en ligne comme expedia.fr), les consommateurs se sont habitués à ce que le montant soit débité (totalement ou partiellement), même en cas d’annulation.
Cette pratique gagne aujourd’hui la restauration rapide, en raison du déploiement du click and collect et de la livraison. "Le click and collect et le prépaiement en ligne permettent d’absorber du flux sur une période courte comme le rush de midi. Les clients récupèrent leur commande sans faire la queue, grâce à un comptoir spécifique, note Michael Cohen, dirigeant associé de Bagel Corner. Mais si la file est inférieure à quinze personnes, il est moins intéressant de mettre en place le prépaiement car le côté humain est essentiel. Quant à la livraison, il faut bien analyser le ticket moyen à atteindre pour être rentable, et bloquer un panier minimum autour de 20-25 €". Et de mettre en garde : "Attention, il existe certains cas de fraudes : des clients passent une commande, ne viennent pas la récupérer et demandent ensuite le remboursement".
Une arme contre le no-show
"Avec l’explosion du no-show depuis deux ans (des clients qui réservent, mais ne viennent pas, ndlr), le prépaiement va vite se développer en France, d’autant que cela se fait ailleurs. Au Noma (le restaurant de René Redzépi, à Copenhague, ndlr), le client doit payer à l’avance l’intégralité du prix du menu, tout comme en Angleterre et aux Etats-Unis. On se retrouve même avec du yield management, les prix variant en fonction de la date de réservation", observe Antoine Girard, fondateur de Guestonline, spécialisé dans la réservation en ligne. Les tables gastronomiques françaises, qui sont les plus affectées par le no-show, se mettent à exiger une empreinte bancaire au moment de la réservation. Le chef William Frachot témoigne : "Le no-show est passé de 20 - 25 couverts par semaine à zéro, grâce à l’empreinte bancaire. Nous prévenons que nous débitons 50 € par personne en cas de no-show, mais en cas d’annulation de dernière minute pour deux ou quatre personnes, nous restons humains et ne facturons rien". Cette décision, l’étoilé l’a prise à contre-cœur : "C’est dommage, cela met une barrière en quelque sorte, alors que notre métier devrait être dans le partage et le respect. Mais c’est l’époque qui veut ça… Et puis cela représente un travail supplémentaire pour les équipes, car le logiciel de réservation est différent du logiciel de facturation".
Thomas Cabrol, à la tête du N°5 Wine Bar à Toulouse, a adopté une politique comparable : une empreinte bancaire est demandée au moment de la réservation, et aucun prélèvement n’est fait si l’annulation a lieu 24 heures avant le dîner. "Ca ne pose aucun problème auprès des étrangers. En revanche, les Toulousains tiquent encore un peu. C’est pourquoi on a préféré ne pas appliquer l’empreinte bancaire pour les tables de deux en semaine, et la limiter aux week-ends et aux tables de trois personnes et plus", précise-t-il.
L’empreinte bancaire, jugée ultra-efficace contre le no-show, entre donc progressivement dans les mœurs. "C’est particulièrement utile quand on doit refuser des gens et qu’il y a un vrai manque à gagner. Par exemple lors des jours ou des créneaux d’affluence, pour les tables de plus de cinq personnes, ou pour des événements comme la Saint-Sylvestre ou la Saint-Valentin, souligne Antoine Girard. L’important, c’est de demander l’empreinte au bon moment, à bon escient, et en expliquant sa démarche".
Publié par Violaine BRISSART