En 2011, les redressements de cotisations opérés par les Urssaf (Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales) se sont élevés à 220 M€ (contre 185 € en 2010), ce qui représente une augmentation de près de 20 % en un an. Les Urssaf ont maintenu un fort niveau d'engagement dans l'exercice des contrôles des six secteurs prioritaires du plan national arrêté par la Commission nationale de lutte contre le travail illégal : bâtiment et travaux publics, hôtels cafés et restaurants, nettoyage, sécurité privée, spectacle, services aux entreprises. Le montant des redressements opérés sur ces secteurs a très sensiblement progressé, passant de 81 741 907 M€ en 2010 à 108 023 218 M€ en 2011, ce qui représente une augmentation de plus de 32 %.
Les actions de prévention et de contrôle réalisées par les Urssaf se sont naturellement centrées sur les secteurs d'activité liés à la saisonnalité, au tourisme et ou aux manifestations culturelles et musicales. Ont été particulièrement ciblés les hôtels, cafés, restaurants et commerces du littoral français, les sites touristiques et culturels, les campings, les festivals, les marchés et braderies.
19 698 salariés auditionnés en période estivale
Le secteur professionnel des hôtels, cafés, restaurants enregistre une diminution de 13 % du nombre d'actions de contrôles ciblées mais confirme dans le même temps de l'augmentation du montant moyen redressé 9 477 € en 2011 contre 9 308 € en 2010. En 2011, ce sont 40 225 établissements qui ont été contrôlés, soit une légère hausse de 8 % en un an.
Sur la seule période de juillet août 2011, 7 365 actions de contrôle contre le travail dissimulé ont été effectués. Lors de ces opérations estivales, 19 698 salariés ont été auditionnés et 1 563 ont été qualifiés de salariés dissimulés, soit une proportion de 8 % des effectifs contrôlés.
Les informations recueillies ont permis de mettre en évidence un taux national de fraude détectée de 7,3 % des établissements contrôlés et un taux de dissimulation de 2,4 % des salariés auditionnés. Le rapport souligne qu'il s'agit vraisemblablement d'une estimation basse de l'ampleur réelle de la fraude, car l'amplitude horaire et journalière des contrôles, par définition limitée, réduit la probabilité de détecter des situations de fraudes.
Par ailleurs, le régime de l'auto-entreprenariat, dérogatoire au droit commun, conduit à des situations de faux travailleurs indépendants au détriment du salariat et de sous déclaration d'activité. Un plan d'action a été mis en place en juin 2011, donnant lieu aux contrôles des comptes de 1 500 auto-entrepreneurs. Ils portent notamment sur les situations d'externalisation d'emplois salariés, en ayant recours à la place à des auto-entrepreneurs.
Profil des établissements fraudeurs
À partir des informations recueillies, le rapport établit des statistiques sur le profil et la situation des établissements fraudeurs. Deux régions se distinguent avec un taux de fraude élevée : l'Île-de-France, qui accuse un taux de redressement de 9,1 % pour 776 établissements contrôlés, et Nord-Ouest (Bretagne, Basse et Haute Normandie) avec un taux de fraude redressé de 16, 2 % pour 418 établissements contrôlés. Les régions Est (Franche-Comté, Bourgogne, Rhône-Alpes) et Ouest (Aquitaine, Poitou-Charentes, Pays de Loire) enregistrent les taux les plus faibles avec respectivement 4,9 % et 5 %.
Les infractions sont présentes dans tous les types d'activité, cependant le rapport souligne que les taux de fraude sont plus élevés dans les hôtels, cafés, restaurants et dans les commerces de détail alimentaire avec respectivement des taux de 14,2 % et 12,7 %. Il a également été constaté que le taux de dissimulation est plus important parmi les salariés de moins de 18 ans et parmi ceux de plus de 60 ans.
La profession déplore une stigmatisation du secteur
Le rapport de lutte contre le travail illégal a été largement repris par les médias, faisant réagir les présidents des organisations patronales du secteur.
Gérard Guy président de la CPIH, regrette : "On met toujours en avant dans les médias les entreprises qui ne respectent pas les règles du jeu, sur les 180 000 entreprises existantes. On se focalise sur les mauvais élèves mais sans jamais parler des bons." Il considère que l'État a légalisé le travail au noir avec le statut d'auto-entrepreneur, qui permet à chacun d'exercer l'activité de restaurateur sans être soumis aux mêmes charges que les professionnels. Quant à la Fagiht, elle met en avant que plus de 94 % des professionnels du secteur respectent parfaitement la règlementation du travail.
"Nous espérons que cela fera réfléchir ceux qui par leurs articles et leurs reportages tentent de laisser à penser que la plus grande part des professionnels des CHR est hors la loi", précise son président Claude Daumas, qui ajoute : "Pour les 5,8 % qui fraudent, nous n'accordons aucune excuse. Et nous insistons une fois de plus pour dénoncer l'embauche non déclarée, traditionnellement pour assurer les pointes, même si c'est à la demande du salarié. Enfin, nous dénonçons une fois de plus la prolifération dans les zones hautement touristiques de cabanes ou de garages aménagés en pseudo restaurants et loués pour une seule saison à des non professionnels qui sévissent sans loi ni règle. Ils portent pour la plus grande part la responsabilité de l'image dégradée de la profession que certains se plaisent tant à dénoncer."
Pour sa part, Roland Héguy, président confédéral de l'Umih, rappelle que la lutte contre le travail illégal est une nécessité pour les entreprises et les salariés du secteur. "Le travail illégal trouble gravement l'ordre public et les équilibres sociaux et économiques du secteur de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration. L'Umih travaille étroitement depuis de nombreuses années avec les organisations salariales pour mettre en place des outils visant à lutter activement contre le travail illégal sous toutes ses formes. En signant le contrat d'avenir le 28 avril 2009, nous nous sommes engagés à négocier un accord avec les partenaires sociaux pour lutter contre le travail illégal au niveau national dans le secteur de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration. Cet accord devrait d'ailleurs être signé lors de la prochaine commission mixte paritaire", précise Roland Héguy. L'accord aura pour but de préciser les actions concrètes qui seront menées par la branche des HCR en vue de sensibiliser et informer les entreprises sur leurs obligations et les salariés sur les conséquences de la pratique du travail illégal. Un observatoire de suivi de la lutte contre le travail illégal devrait être mis en place.
Publié par Pascale CARBILLET