Après les sénateurs lundi, les députés s’attaquent à leur tour aux avantages fiscaux et à la liberté d'action dont bénéficient les meublés touristiques. Pour “remédier aux déséquilibres du marché locatif en zones tendues”, une proposition de loi transpartisane, portée par les députés Annaïg Le Meur (Renaissance) et Iñaki Echaniz (PS), a été présentée le 28 novembre en commission des affaires économiques.
L’objectif de ce texte, soutenu par la Première ministre Elisabeth Borne, est de lutter contre la prolifération des meublés touristiques qui assèche le marché locatif classique, notamment dans les zones touristiques. Il s’agit de donner aux maires les outils pour réguler ce marché et de mettre un terme à la réglementation fiscale avantageuse dont bénéficient les meublés touristiques.
Ses principales dispositions :
• La suppression de l’avantage fiscal dont bénéficient les meublés touristiques, en harmonisant les plafonds d’abattement forfaitaire à 40 %. Cet abattement sur les loyers perçus est actuellement de 71 %, contre 50 % pour les meublés classiques et de 30 % pour les locations vides. Une injustice fiscale depuis longtemps dénoncée par les professionnels de l’hôtellerie.
En revanche, les chambres d’hôte, les gîtes ruraux et les stations de ski devraient conserver cet abattement à 71 %. Cet amendement risque d’être très disputé lors de son examen dans l’Hemicycle, en raison de l’impact qu’il pourrait avoir sur le budget de l’Etat.
• L’obligation pour les bailleurs de disposer d’un numéro d’enregistrement avant de publier une offre et ce, partout en France, afin de permettre aux maires de mesurer le nombre de locations saisonnières dans leur commune. Cette obligation n’est actuellement en vigueur que dans quelques zones en tension, comme Paris, Saint-Malo, Bordeaux, au Pays Basque, ou encore en Paca.
• La possibilité pour tous les maires d’imposer une demande de changement d’usage aux propriétaires de résidences secondaires avant que ces derniers mettent leur bien en location saisonnière (elle n’est obligatoire que dans les villes de plus de 200 000 habitants).
Avantage de cette mesure : au moment du changement d’usage, le propriétaire devra fournir un diagnostic de performance énergétique pour louer son bien, à l’instar des locations classiques, remédiant de fait à l’injustice qui règne aujourd’hui entre ces deux types de locations et qui incite les bailleurs à se tourner vers la location touristique.
• La possibilité pour les maires de créer un quota de locations dans leur commune, avec une autorisation de location limitée à cinq ans, et d'imposer une mesure de compensation aux bailleurs (la transformation d’un logement en meublé touristique doit être compensée par la transformation d’un local commercial en habitation). “Les communes qui agissent sont aujourd’hui systématiquement attaquées en justice par des propriétaires de meublés. Cette sécurité permettra aux collectivités d’utiliser l’outil le plus adapté sans avoir à engager une armada d’avocats”, justifie Iñaki Echaniz, sur le site lemonde.fr.
• La possibilité pour les agglomérations comptant plus de 20 % de résidences secondaires de créer des zones où les nouvelles constructions et les réhabilitations seront destinées aux seules résidences principales.
Après avoir été adoptés en commission dans la nuit du 28 au 29 novembre, ces amendements doivent encore être débattus à l’Assemblée nationale début décembre, puis au Sénat. Toutefois, devant la crise actuelle du logement, ils devraient recueillir l’adhésion de nombreux élus. Entre 2016 et 2023, le nombre de locations touristiques a plus que triplé, s’élevant aujourd’hui à plus de 1 million. La France représente notamment le deuxième marché d’Airbnb, après les Etats-Unis.
Publié par Roselyne DOUILLET