Pierre et Caroline Legrand ont pris leur temps. Le temps de construire une équipe, de structurer, de poser un esprit. Et le guide Michelin vient de récompenser ce travail pointu, engagé sur Rennes depuis 2012. "J'ai quitté les cuisines de Lecoq-Gadby en juillet 2012, pour ouvrir Aozeñ avec Caroline."
Pierre Legrand laisse l'étoile chez Lecoq-Gadby, et son épouse renoue avec la salle après le Plaza Athénée (Paris, VIIIe). "Au départ, nous ouvrions midi et soir, avec menu bistrot au déjeuner et gastronomique au dîner. Mais ce n'était pas ce que nous souhaitions." Les deux professionnels, aidés en cuisine par la discrète Claire, attendent en fait l'arrivée d'une deuxième personne en salle pour concrétiser leurs idées. "Début 2013, l'arrivée de Fabien Le Bourg, que j'avais connu chez Lecoq, nous a permis de franchir un cap", explique le chef, passé chez Lucas Carton et Taillevent (Paris, VIIIe).
"Mettre la salle et la cuisine sur un pied d'égalité"
Aozeñ ferme alors le midi pour n'ouvrir qu'en soirée, du mardi au samedi soir. Pierre et Caroline Legrand limitent les services à 25 couverts et proposent deux menus uniques par semaine. "Nous souhaitons plus que jamais mettre la salle et la cuisine sur un pied d'égalité. Nous en avons assez de cette starisation du chef et de la cuisine."
Ensemble, ils accentuent les accords mets et vins. "Nous n'avons rien inventé, ce fonctionnement misant sur les accords est de mise dans d'autres maisons, mais nous voulons vraiment en faire l'axe principal d'Aozeñ. Un plat seul n'a plus d'intérêt pour nous." Pour travailler ces vins, Caroline Legrand travaille avec un caviste "qui connaît bien la cuisine de Pierre, Stéphane Foucher de la Cave Pinard à Rennes."
Un fonctionnement pointu, pour une cuisine "saine et utile", basée sur le locavore. Ici, on privilégie, avec les vins comme en cuisine, les petites productions et les rapports humains. "Il faut qu'il se passe quelque chose entre un producteur et le cuisinier. Je ne me vois pas travailler le produit, aussi excellent soit-il, de quelqu'un qui, humainement, ne m'intéresse pas." Entre autres producteurs, on retrouve le volailler Paul Renault, la maraîchère Annie Bertin, le jus de pomme élaboré en biodynamie par Chantal et Paul Simmoneaux, les viandes de Sylvain Desbois…
Publié par Olivier MARIE