À 50 ans, Thierry Suchet affiche une belle réussite professionnelle
avec trois agences immobilières et un beau parcours débuté en 1992. L'an
dernier, cependant, il prend la décision de tout vendre et de changer de
métier. "L'immobilier, j'en avais fait le tour. En revanche, j'étais toujours
aussi passionné par la grange de mon grand père, Pépé Nicolas, située au
milieu des alpages et transformée, il y a vingt ans, en buvette. Ce qui m'a
fait faire le grand saut, c'est quand j'ai appris qu'une piste de ski allait
passer à côté. Je me suis dit que c'était une aubaine à ne pas négliger. Entre Les Menuires et Val Thorens, nous pouvions attirer de
nombreux clients, midi et soir."
Thierry Suchet va convaincre son frère Éric
et son cousin, Bruno, de se
lancer dans l'aventure. De gros travaux sont nécessaires, de l'ordre d'un
million d'euros. Il faut ensuite obtenir les autorisations administratives. Un
des plus gros obstacles est l'aménagement. Il faut créer un chemin d'accès car
le futur établissement est loin d'une route carrossable, faire venir l'électricité
et l'eau et créer l'assainissement. "Pour que le modèle économique soit rentable,
nous avions besoin de 120 couverts en terrasse et 100 couverts à l'intérieur,
et du stockage sur 90 m², car en hiver, l'approvisionnement se fait en
motoneige." Les travaux sont également soumis aux conditions
climatiques. Impossible de continuer le chantier entre janvier et avril. "Cependant, nous avons bien ouvert en temps
et en heure, grâce à notre maître d'oeuvre, qui connaissait les contraintes." L'épouse de Thierry Suchet, Magali, s'occupe
de l'aménagement intérieur. Elle a transformé ce qui était une grange en refuge
contemporain et douillet.
Trouver un concept
Il reste alors encore à construire un concept qui attire la clientèle. "Des
restaurants d'altitude, il y en a beaucoup. Pépé Nicolas devait être différent.
Je n'ai pas voulu effacer l'histoire des lieux. Mon grand-père prenait des
bêtes en estive. Il ne pouvait en être autrement chez Pépé Nicolas."
Thierrey Suchet trouve donc des animaux et engage deux bergers, ce qui augmente
la masse salariale. "Les fermiers du coin étaient contents de nous louer
leurs bêtes. Ils touchent une indemnité en fonction de la production de lait." Cette attraction fait la différence :
dix vaches, soixante-dix chèvres mais aussi ânes, chevaux, cochons, canards,
pintades, poules, lapins, agneaux... attirent une clientèle touristique et
locale. "Les clients arrivent à pied dans
un lieu loin de toute habitation et de toute route avec vue sur les montagnes.
Ils assistent à la fabrication des fromages, à la traite, caressent les chèvres
et les cochons."
Le restaurant joue la carte du traditionnel (plat du jour : 14,50 €,
20-25 € à la carte). Autre bonne idée : la boutique de produits
dérivés (miel, fromages, peaux de mouton...) fonctionne bien. Malheureusement,
peu de temps après l'ouverture, Éric Suchet est emporté par la maladie. Son
fils, Valentin a choisi de reprendre
le flambeau. C'est lui qui s'occupe désormais des visites guidées pour la
traite et la fabrication du fromage. "J'ai pu réaliser ce rêve, car je passais
tous les étés chez Pépé Nicolas, rappelle Thierry Suchet. Il ne faut pas se lancer au hasard. Il est
important de bien connaître la montagne pour concrétiser un tel projet."
Publié par Fleur Tari