"Je suis fils de paysans. À 14 ans, un peu par hasard, je suis entré dans une cuisine et j'ai su que ce serait ma vie. J'ai démarré par un apprentissage classique, avant de faire un tour de France des cuisines. J'ai travaillé pour des bistrots et des grands chefs comme Alain Ducasse, Jacques Maximin et Alain Senderens. Ces différentes expériences m'ont permis de trouver mon style et, à 23 ans, j'ai occupé ma première place de chef au Château de la Messardière, à Saint-Tropez. J'y ai d'ailleurs reçu une clé d'or de la gastronomie décernée par Gault&Millau. Deux ans plus tard, j'ai monté mon premier restaurant à Saint-Tropez, La Table du marché, dans un esprit mêlant bistrot, épicerie et pâtisserie. Puis, j'ai développé un service de traiteur événementiel : aujourd'hui, avec notre laboratoire de 500 m² à Cogolin, on prépare toutes les fêtes qui comptent de l'été tropézien. J'ai également ouvert Les Moulins de Ramatuelle. C'est dans cette auberge de charme que j'ai repris le concept des fameuses soirées blanches d'Eddie Barclay. Tous les ans, en juillet, on donne la soirée qui ouvre la saison à Saint-Tropez. Cela permet notamment de montrer à nos clients les tendances du moment.
Le chef français le plus implanté au Maroc
Une fois bien installé, j'ai commencé à exporter notre savoir-faire. En 2004, j'ai découvert Marrakech. J'ai eu un coup de foudre pour cette destination. J'ai senti que le marché s'ouvrait et j'ai voulu faire quelque chose au Maroc. J'ai rencontré plusieurs investisseurs, ce qui m'a permis de développer différents concepts, notamment en franchise. La Table du marché est implantée aussi bien dans des aéroports que dans des centres commerciaux. Leroy's Kfé est un concept plus contemporain que j'ai ouvert dans le cadre de l'hôtel Palmeraie Golf Palace, où je gère l'ensemble de la restauration. J'ai également repris en 2012 le boutique-hôtel de mes rêves, le Jardin d'Inès, dans lequel j'ai lancé le restaurant gastronomique Christophe Leroy.
Aujourd'hui, je pense être le chef français le plus implanté au Maroc. Plus de 400 personnes travaillent pour nos établissements et nous allons compter une vingtaine de points de vente dans le pays d'ici à fin 2016. Nous allons consolider tout cela avec un atelier de cuisine basé à Marrakech. Une école interne permet d'ores et déjà de former les équipes. Chaque année, une bourse sera attribuée à un commis de cuisine issu d'une famille défavorisée du Maroc. Cela lui permettra de suivre gratuitement les cours. À l'issue de sa formation, il pourra obtenir un poste dans l'une de mes brigades. C'est une façon de rendre tout ce que ce pays m'a donné. Par ailleurs, cette école développera un autre axe dès le mois de septembre. Des particuliers - touristes ou marocains - pourront venir y approfondir leurs connaissances culinaires et partager notre philosophie, notre savoir-faire.
Mon expérience n'est pas un long fleuve tranquille
Actuellement, je divise mon temps entre la France, le Maroc et l'Amérique. J'ai en effet repris en 2009 un complexe hôtelier sur l'île de Saint-Martin, où j'ai installé une Table du marché, et je viens d'ouvrir un restaurant à Miami.
Un parcours comme le mien, cela n'est jamais aussi lisse que ce que l'on croit. Cela représente du travail, du culot. Je pense que je n'ai pas peur d'essayer. Pour être honnête, je n'ai rencontré que des difficultés dans ma carrière. Un concept, c'est une chose, mais il doit aussi se moduler en fonction du marché et du pays. Au Maroc, j'ai fini par trouver les codes, mais cela n'a pas été immédiat : je propose désormais de la cuisine française plutôt classique et des plats marocains revisités. Aux États-Unis, tout comme aux Caraïbes, mon expérience n'est pas un long fleuve tranquille. Il faut s'adapter au goût local et trouver le bon compromis. Il faut également réussir à trouver la bonne équipe et cela prend du temps. Le fait de travailler en indépendant constitue une autre difficulté, car les choses sont lourdes à porter financièrement. Enfin, il faut compter avec la crise économique, présente depuis 2008. Nos activités sur la Côte d'Azur s'en trouvent affectées."
Publié par Propos recueillis par Violaine Brissart
mardi 7 juillet 2015