Les conditions de vie au travail et la fidélisation du personnel sont devenues des sujets centraux pour le secteur de l’hôtellerie-restauration. C’est pourquoi le réseau Teritoria (ex-Collectionneurs) a choisi consacrer à ces thèmes son Déjeuner des chefs, qui s'est déroulé le 15 avril, à l'Abbaye de Collonges (Rhône). Et pour les illustrer, Alain Ducasse, fondateur, Carole Pourchet, directrice générale de Majorian, maison-mère de Teritoria, et Xavier Alberti, PDG de Majorian, ont convié Claude Onesta, ancien sélectionneur de l’équipe de France de handball, à présenter sa vision du management d’équipe aux 80 chefs présents à cette occasion.
Car, comme l’a rappelé Xavier Alberti en préambule,“une nouvelle génération est arrivée en salle et en cuisine, et cela ne sert à rien de s’en plaindre”, puisque, explique-t-il, cela ne résoudra en rien les problèmes des chefs d’entreprise. Au contraire, il faut aujourd’hui “comprendre la crise du recrutement pour y apporter des remèdes”. Et si les jeunes générations ont “perdu le goût de l’effort”, elles ont surtout, à l’heure des réseaux sociaux, un fort besoin de reconnaissance.
Passer de la direction à l’accompagnement
À la tête d’un nombre record de victoires entre 2001 et 2016, lorsqu’il était sélectionneur de l’équipe de France, Claude Onesta s’est constamment interrogé sur la force du collectif qui lui permettait de se mobiliser et de remporter les matchs. Il faut, affirme-t-il “passer de la direction à l’accompagnement” car, pour créer les conditions d’un engagement total et d’une mobilisation permanente, les équipes doivent pouvoir adhérer au projet du dirigeant, agir à ses côtés et non subir ses décisions. D’autant que les jeunes s’ennuient vite et n’hésitent pas à quitter leur entreprise si les conditions de travail ou les perspectives ne leur conviennent plus.
Les clés d’une performance durable
Or, l’enjeu actuel est de garder les équipes dans la durée, tout en maintenant leur performance. Claude Onesta a détaillé les principes qu’il avait appliqués lorsqu’il était sélectionneur, afin de favoriser l’engagement de chaque membre de l’équipe.
- Être en permanence à la recherche d’innovations, car cette démarche d’apprentissage permettra à chacun de faire son travail avec plus d’attention et de rigueur, et de rester vigilant sur la qualité. Lorsqu’un salarié apprend en permanence, il maintient son intérêt pour son poste, ce qui l’incite à rester.
- Favoriser l’épanouissement personnel dans le travail, car chacun y passe une grande partie de sa vie. Plus on arrive à partager et à se respecter entre collègues, plus la cohésion des équipes est possible.
- Partager la responsabilité et demander leur avis aux collaborateurs, car cela implique une prise de risque de leur part, et de partager les échecs et les victoires : “Chacun aura des comptes à rendre devant les autres, ce qui génère automatiquement de l’engagement.”
De plus, ajoute Claude Onesta, même si cela peut prendre du temps, “plus vous donnez de l’autonomie et de l’écoute, plus chacun va proposer, et éventuellement se tromper. Or, on apprend énormément de ses défaites”. - Comprendre la ‘génération des likes’ : les jeunes n’ont pas le même rapport à l’apprentissage et à la verticalité de la hiérarchie. "Leur première source de connaissances est Google, donc il ne sert à rien de les obliger à se taire et à vous écouter." Ils viennent chercher les informations quand ils en ont besoin, pas lorsqu’on leur impose, sans que cela les rende inefficaces.
Ce qui n’empêche pas Claude Onesta de fixer des limites : “Le premier talent d’un manager est d’avoir le goût des autres. Toutefois, ‘bienveillant’ ne veut pas dire être ‘trop gentil’, ‘collaboratif’ ne veut pas dire ‘tout laisser faire’. Il faut laisser de l’espace à chacun, mais diriger le tout.”
Et Alain Ducasse de conclure : “Le management et les ressources humaines ne sont pas le point fort de notre profession, c’est pour cela qu’il faut qu’on s’en occupe sérieusement. Il faut oser encore et toujours, et changer de point de vue. Il faut chercher ce qui peut contribuer à l’épanouissement des femmes et des hommes qui travaillent avec nous. C’est un effort collectif qui va porter ses fruits pour l’ensemble de notre profession.”
Publié par Roselyne DOUILLET
jeudi 18 avril 2024