L'univers épicé d'Olivier Roellinger

Saint-Méloir-des-Ondes (35) À l'occasion du championnat de France du Dessert, le président du jury nous avait confié sa vision du dessert de restaurant et était revenu sur les gourmandises proposées dans son établissement.

Publié le 17 juillet 2013 à 13:21

"Quoi de mieux que la gourmandise ?", demandait malicieusement Olivier Roellinger aux candidats du 39e championnat de France du Dessert, en mars dernier à Rennes (35). Les seize prétendants au titre, aussi bien les élèves que les professionnels, avaient dû retrousser leurs manches pour satisfaire aux exigences du chef breton, qui présidait le jury. Et la tâche n'était pas facile avec une épreuve surprise sans gluten. "C'est un enjeu sociétale. Il faut être sensible à ce problème de santé publique, revendiquait le chef. On doit se préoccuper de tous les clients et prendre en compte ces difficultés. À nous - cuisiniers et pâtissiers - de nous adapter." Les candidats avaient alors travaillé avec des produits de substitution à la farine de blé : les farines de maïs, de riz, de pois chiche, la fécule de pomme de terre, la pectine, le lait de soja, l'agar-agar...

Autre exercice palpitant : travailler sur le thème Retour des Indes orientales et occidentales. Olivier Roellinger se sentait en devoir d'apporter une touche épicée à ce concours, sa marque de fabrique. "Les candidats étaient un peu timides, déplore-t-il. L'épice est là pour relever ou rehausser un plat. C'est un véritable plus qui permet de lutter contre l'excès de sucre, de sel ou de poivre." Sur ce thème, il attendait que l'on associe les épices de l'Orient (badiane, cardamome...) avec celles du Nouveau Monde (vanille, cacao...). Le tout en s'imprégnant de l'histoire de la Bretagne : le sablé, les crêpes, la compote de pommes et autres gourmandises. Devant les assiettes, Olivier Roellinger avait regretté que "les pâtissiers ne soient pas assez devenus des cuisiniers. Arrêtez de penser graphisme et texture ! Prenez plutôt le temps de goûter les produits. Il faut éduquer votre palais." Et de donner un conseil : pourquoi ne pas cuisiner un produit en chaud ? En soupe, en consommé, en infusion, en décoction...

À la différence du dessert de boutique, rappelle le chef, on peut se permettre au restaurant de "jouer avec les contrastes chaud-froid ou de travailler les fruits crus, mi-cuits ou cuits. Il faut avoir de l'audace dans la maîtrise du feu et des jeux de température". Autre possibilité : travailler sur l'équilibre de la construction. "Les pâtissiers peuvent se permettre de véritable défis à la pesanteur, à condition d'avoir en tête que l'assiette doit rester intacte jusqu'à son arrivée sur la table. Et qu'elle doit être visuellement appétissante jusqu'à la dernière bouchée." En véritable pédagogue, Olivier Roellinger n'avait pas manqué de distiller ses astuces et conseils aux candidats.

Générosité et gourmandise

Le chef revient sur sa vision de la pâtisserie, chez lui, à Cancale (35). À savoir "l'esprit de la gourmandise épicée". Pendant trente ans, et jusqu'à l'obtention de ses trois étoiles au Michelin en 2006, il proposait ses desserts à l'assiette. Et puis, l'envie de générosité et de gourmandise prennent le dessus. Il ferme sa table gastronomique, Le Relais gourmand. Aujourd'hui, le restaurant Le Coquillage, un bistrot marin niché dans le Château Richeux, qui domine la baie du Mont-Saint-Michel, sent bon la simplicité. Côté pâtisserie, Olivier Roellinger a troqué les assiettes pour une grande roulante en bois en salle : "Les clients craquent en voyant toutes ces gourmandises à partager. C'est notre pâtissier, Mathieu, qui fait directement le service. On voit des échanges se faire entre les tables. Cela crée des liens. C'est ce que j'aime. Et puis, on dit que le lien, c'est la gourmandise."

À déguster, donc : Millefeuille aux trois vanilles ; Profiteroles, glaces au lait (bio) ; Paris-Cancale (interprétation du paris-brest avec une pure pâte de pistaches, noisettes-amandes) ; Tarte choco-gingembre, beurre salé ; Moka très café, pur sirop de cardamome verte ; Compotée de pommes tièdes, safran, cardamome noire fumée ; Ananas-mangue, sorbet à l'eau de rose ; Meringues ; Guimauve au pamplemousse… Ces plats aux saveurs si particulières ne sont réalisables qu'avec les épices qu'Olivier Roellinger va chercher dans le monde, qu'il travaille, torréfie, broie... Il dispose de 65 épices, dont 18 grands crus de vanille, et différentes poudres que l'on peut notamment retrouver dans les Entrepôts Épices-Roellinger (à Cancale, Saint-Malo et Paris). D'aucuns disent que sa pâtisserie, à elle seule, vaut le détour.


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Publié par Hélène BINET



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