Dans les sept établissements Maison Carne, spécialisés dans la côte de bœuf, les clients peuvent découvrir des vins régionaux en bouteille… ou une seule référence (un vin rouge de la cave de Castelmaure - AOC Corbières) au centimètre. “Les serveurs apportent une bouteille de vin au format magnum (1,5 litre) graduée jusqu’à 24 centimètres. 1 cm = 1 €, vous ne payez que ce que vous buvez. Les clients se servent directement au magnum, c’est eux qui gèrent leur consommation sans avoir la pression de devoir boire une bouteille entière ou seulement un verre de vin. Pour eux, il y a un côté ludique et convivial, mais aussi un très bon rapport qualité-prix : nous vendons 1,5 litre à 24 € - soit un équivalent bouteille à 12 € - et un verre à environ 2 €, alors qu’en moyenne les verres de vin dans un restaurant traditionnel oscillent entre 3 et 5 €. Nos autres références, quant à elles, vont de 22 € à 70 €”, détaille le fondateur de l’enseigne, Baudoin de Fournas. Résultat : dans ces établissements d’une quarantaine de couverts, 85 % des ventes de vin se font au centimètre.
Pour ce faire, le restaurateur a mis en place un partenariat avec une cave coopérative qui lui livre des palettes de Bib de 10 litres. “Les serveurs remplissent les magnums, puis les bouchent avec une bouchonneuse manuelle et un bouchon de liège, et ce à chaque fin de service. Dans un magnum bouché, le vin peut se conserver une semaine sans aucun souci d’oxydation. Il faut bien laver l’extérieur du contenant à chaque remplissage pour éviter de donner une impression d’une bouteille déjà utilisée au consommateur suivant”, poursuit-il. Coût de l’opération ? “Ce qui coûte cher, c’est le premier calque, car c’est gravé dans la masse. Mais comme on s’est développé, on en a fait pas mal, et le contenant revient maintenant à une trentaine d’euros. La bouchonneuse coûte une centaine d’euros, et les bouchons en liège, 150 € le sac de 1 000. C’est vite rentabilisé”, reconnaît Baudoin de Fournas.
Moins de travail en salle
Sur le littoral belge, L’Atelier de Mathilde - un restaurant de vingt couverts spécialisé dans la cuisine du Sud-Ouest de la France - a également opté pour le vin au centimètre. “J’avais rencontré des restaurateurs qui faisaient du vin à la ficelle lorsque j’étais responsable F&B dans l’hôtellerie de luxe. Mais il est plus facile d’expliquer le concept de vin au centimètre qu’à la ficelle, d’autant qu’on est d’origine francophone et qu’on travaille dans une région flamande”, confie le maître des lieux, Patric Spitaels. Ce dernier a consacré une page entière de son menu au concept et aux deux vins proposés au centimètre. “On a deux crus du même domaine, le Château Montdoyen, du sud-ouest de Bergerac : un rouge d’une qualité supérieure de 2011, et un blanc de 2022. Les clients peuvent se faire plaisir avec un bon vin. Une grande majorité des clients ne connaissent ni le Bergerac ni cette formule, mais ils sont curieux. Près de la moitié des clients prennent finalement du vin au centimètre et aiment la flexibilité du système, en buvant exactement la quantité qu’ils veulent”, remarque-t-il. Et d’ajouter : “Le vin au centimètre m’évite d’avoir un trop grand stockage pour des demi-bouteilles de vin. Cela me permet de ne rater aucune vente. Et puis cela demande moins de travail que le vin au verre, puisque les gens se servent eux-mêmes. C’est très pratique quand on est seul en salle, comme moi.”
Dans la droite lignée du vin à la ficelle, Patric Spitaels sert les bouteilles de bergerac directement à table : “Elles font 26 cm de haut, avec des prix allant de 1,50 à 1,70 € par centimètre. J’ai des bouchons spéciaux pour les bouteilles entamées, et le reste est servi au verre”, note-t-il. En fin de repas, il mesure ce qu’il reste dans la bouteille avec son double décimètre. Un geste qui “amuse les gens”, et crée une expérience en salle.
Publié par Violaine BRISSART