C'est dans un ancien relais de poste du XVIIIe siècle, à Coudekerque (Nord), que Michel Hazebrouck régale ses clients au Soubise, depuis 1987. Auparavant, il y a eu quatre autres établissements dont le café-hôtel-restaurant de son grand-père à Bourbourg, de 1963 à 1965, deux restaurants montés à Dunkerque et revendus en 1984, un premier Soubise à Dunkerque revendu en 1987, avant de s'installer définitivement à Coudekerque.
Mais Michel Hazebrouck a préféré débuter sa carrière de cuisinier dès son apprentissage à partir en 1959. Des années marquantes pour le tout jeune homme "tombé dans la marmite d'une famille de restaurateurs et hôteliers des deux côtés". C'était à Lille, bien avant l'ouverture du lycée Michel Servet. "Roger Portugal, MOF 1961, en était l'un des professeurs du CAP. Nous faisions trois heures de cuisine par jour pendant trois ans", raconte avec fierté Michel Hazebrouck, qui rend hommage à son professeur en le citant sur sa carte.
Les clients lui font sa pub
Car l'homme est un fidèle. Son personnel ne lui rend bien : ses six collaborateurs le suivent depuis trente ans. Une rareté dans le métier que Michel Hazebrouck aime souligner. Les clients, tous des habitués, se passent le mot, faisant se renouveler naturellement la clientèle. "Je n'ai jamais eu besoin de faire de la publicité quelque part. Mes clients se chargent de la faire pour moi", raconte le chef. C'est ce qui s'est passé pour la clientèle belge (60 %) du restaurant situé seulement à 15 km de la frontière, et pour celle issue de la vie économique dunkerquoise. "Il y a peu de clients de passage ici, malgré la proximité de la route et de Bergues. Ceux qui viennent exprès viennent pour le Bib Gourmand et sont surtout des étrangers ou quelques Français connaisseurs", souligne-t-il. Les 45 couverts sont complets midi et soir, du lundi au vendredi (le Soubise est fermé les week-ends).
En cuisine, il faut se renouveler
"Il ne faut pas servir trop juste", affirme le chef. Il prend l'exemple d'une part de turbot de seulement 100 g - parce qu'elle lui revient trop chère à 150 g - à laquelle il va rajouter un filet de sole farcie "pour ne pas léser les clients". "Ensuite, il faut se renouveler, au quotidien si possible." Michel Hazebrouck change tous les jours deux ou trois plats de sa carte, en fonction des produits qu'il trouve au marché du matin, comme des asperges de dunes de Guyvelde (59) et grosses langoustines. Il n'est pas spécialement attaché aux produits de la région, mais s'efforce de trouver les meilleurs, ici ou ailleurs. "Un beau produit doit se montrer. Inutile de le noyer sous la sauce", insiste-t-il. Ce geste culinaire découle d'un allégement général et progressif de sa cuisine. "Je n'ai suivi aucune mode. Mais j'ai essayé de toujours avoir une qualité égale et constante, pour ne jamais décevoir." À la carte, deux menus seulement : le Jubilé (47 €, et 56 € avec vin) et le Bibendum à 32 €, chacun avec trois plats, mise en bouche et mignardises. Un menu 'Le temps presse' à 25 € à midi permet de choisir un plat et un dessert dans le Bibendum.
En salle, un service personnalisé
"Il faut bien connaître ses clients et leur offrir un service personnalisé", explique Michel Hazebrouck. C'est lui qui va toujours prendre les commandes. Son bagou et sa bonne éducation en font un comédien expert en la matière. Son show est même attendu par les clients ! L'ambiance est garantie dans les deux salles, au décor pourtant classique mais savamment éclairé et aux tables impeccablement nappées.
"C'est le client qui fait le succès d'un restaurant. Sans lui, on n'est rien. On se doit d'être attentionné", renchérit-il, en parlant même d'une "seconde famille" à créer. Une seconde famille constituée aussi par son personnel, "à qui il faut savoir faire confiance et partager". À 71 ans, dont cinquante-six années derrière les fourneaux, Michel Hazebrouck reste un chef généreux et un homme avisé, toujours porté par sa vocation.
Publié par Emmanuelle COUTURIER