L'Hôtellerie Restauration : pensez-vous que tous les restaurateurs soient en mesure d'appliquer le décret ?
Nicolas Nouchi : Il y a la volonté à travers ce décret d'identifier ceux qui produisent une restauration à partir de produits bruts et frais à 100 %, mais on ne donne pas les moyens aux petites restaurations de le faire. Compte tenu des charges notamment, il est compréhensible que certains prennent des raccourcis et ne parviennent pas à appliquer une restauration 100 % faite maison. Il y a une dimension de rationalisation du professionnel. Celui qui a fait le choix d'aller vers du frais quand le décret est sorti, est revenu, à un moment donné, à la réalité, en utilisant également des produits semi-finis. On peut légiférer, réglementer, mais il faut le faire avec un échantillon représentatif des restaurateurs. Ceux qui ont légiféré ne comprennent pas les velléités des professionnels du secteur.
L'Hôtellerie Restauration : Quels étaient les objectifs avec ce décret ?
L'objectif était de rassurer le consommateur, qui est inquiet dans un contexte de crise alimentaire, économique, avec une explosion de l'information. Le problème, c'est que le consommateur n'a pas lu le décret. Ensuite, on lui dit c'est fait maison, mais quand ça ne l'est pas, il va éviter ce lieu alors qu'en soi, il n'y a pas de raison. Il y a quelques restaurateurs qui ont décidé de mettre le logo devant certains plats et pas d'autres mais du coup les clients ne prennent pas les plats sans logo donc finalement le restaurateur l'enlève partout. D'un côté on voit l'enjeu, c'est quand même mieux de faire du fait maison. C'est d'ailleurs la volonté du restaurateur, qui souhaite faire, par principe, une meilleure qualité. Mais en même temps il y a le principe de réalité du professionnel.
L'Hôtellerie Restauration : Voyez-vous des éléments positifs depuis la mise en place de ce décret ?
Oui, il y a des éléments positifs grâce au décret. Comme une utilisation plus importante de produits frais. On constate une montée en gamme. Le restaurateur, même débordé, tente de communiquer, d'où plus d'informations, plus de contenus. Depuis trois ans on constate l'émergence de nouveaux restaurateurs, d'une nouvelle génération en cuisine, qui cuisine plus authentique, plus brut. Cette démarche a été boostée par le fait maison. Et ça génère des cartes de plus en plus courtes. Carte courtes et renouvelées car il y a une volonté de circuit court, de réduire les intermédiaires. Le décret a également beaucoup apporté à la restauration rapide et à la boulangerie.
Si les effets du fait maison sont plutôt négatifs, avec de moins en moins de communications dessus, des restaurateurs qui ont du mal à l'appliquer à 100 %, et peu de clients qui le comprennent, les impacts sont plutôt positifs avec une nouvelle génération de restaurateurs qui privilégie les cartes courtes, pour faciliter les circuits-courts.
Publié par Romy CARRERE