À l'approche de la quarantaine, Florent et Sabine Talbot ont décidé de changer de vie. "On
travaillait tous deux en restauration. Moi, j'évoluais dans le secteur depuis l'âge
de 17 ans. D'abord comme saisonnier, puis à Marseille. Avec deux enfants en bas
âge, les horaires devenaient compliqués. On a voulu se mettre à notre compte, à
la campagne", raconte le restaurateur. Le couple visite des établissements,
du Gard jusqu'à la Corse. Un jour, il finit par tomber sur un article paru dans
La Provence. "Le journal abordait
le problème de la désertification des campagnes et parlait d'un bistrot de pays
qui cherchait un repreneur à Mallefougasse-Augès, dans les Alpes-de-Haute-Provence.
Je me suis présenté à la mairie, sans même savoir ce qu'était un bistrot de
pays. On ne savait pas trop où on mettait les pieds, nous qui n'avions jamais
travaillé à la campagne", avoue-t-il.
L'établissement est en piteux état, tout comme sa réputation. "Il y
avait eu plusieurs repreneurs qui s'étaient succédé, sans succès. Le dernier n'avait
pas payé EDF, ni les fournisseurs. Le bistrot avait été fermé pendant plusieurs
mois pour cause d'hygiène. Ma femme n'était pas convaincue, mais moi, j'avais
mon idée", sourit le restaurateur. Tout d'abord, Le Fougassais est bien
situé, "à trente minutes de Gap et de Manosque, vingt minutes de Sisteron et
Digne-les-Bains, pas loin des Pénitents des Mées et de la montagne de Lure, d'un
centre de vol à voile…" L'enseigne est dénuée de concurrence proche,
bien que la région, touristique, compte de nombreux gîtes, chambres d'hôtes et
résidences secondaires. Autre atout : la gérance et la caution sont peu
chères, ce qui réduit les risques financiers. "J'ai pensé qu'il serait plus
facile de repartir de zéro, à partir d'un établissement fermé, que de reprendre
une adresse avec une bonne réputation, car cela éviterait toute comparaison",
explique Florent Talbot.
Axer sur la restauration
Le professionnel étudie l'historique de l'enseigne et décide de sa
stratégie. "Plutôt que de faire comme mes prédécesseurs, j'ai décidé d'axer
l'établissement sur la restauration et de limiter la partie bar, pour plusieurs
raisons. Le bar n'était pas mon métier. Par ailleurs, un bar pur marche bien en
centre-ville, mais pas dans un village de 80 habitants. Et puis cela permettait
d'éviter la clientèle qui joue aux cartes pendant des heures, sans vous assurer
votre chiffre d'affaires", détaille-t-il.
Le couple négocie avec la mairie : il assurera les travaux contre
quatre mois de loyer offerts. Les Talbot démarrent donc leur nouvelle activité
en 1999. Au menu : une cuisine du terroir, ainsi que des plats cuits au
feu de bois (pizza, magret grillé entier, brochettes d'agneau de Sisteron…). "J'ai
fait le constat, lors de mes expériences précédentes, qu'un bon rapport
qualité-prix amène toujours du monde. C'est ce que l'on a fait : de la
cuisine simple avec de bons produits. On propose également des portions
généreuses, car les gens d'ici aiment manger en quantité", déclare le
restaurateur.
"Un pari gagnant"
Au début, les achats ne sont pas évidents : "J'ai été obligé de
payer les fournisseurs au déchargement du camion, car ils n'avaient pas confiance à cause des impayés de l'ancien propriétaire", se rappelle-t-il. Par manque
de moyens, l'établissement ne fait aucune publicité, mais préfère organiser un
pot d'ouverture en invitant les maires des environs. "Le bouche à oreille va
vite dans les villages, la première impression est déterminante. Grâce à cela,
le restaurant a rapidement bien marché", note-t-il.
Malgré une activité saisonnière, Le Fougassais assure entre 10 000 et
12 000 couverts par an. "C'est un pari gagnant. On a pu racheter
le fonds de commerce dès 2002, on s'est acheté une maison, on se fait un voyage
au chaud chaque année pour faire de la plongée… Bref, on vit très correctement.
On a fait le bon choix."
Publié par Violaine BRISSART
vendredi 20 mai 2016
vendredi 20 mai 2016
jeudi 19 mai 2016