Dans le quotidien mouvementé qu’est celui d’un chef de cuisine, il n’est pas simple de prendre le temps de réfléchir à sa pratique professionnelle et de se réinventer. C’est pourtant ce qu’est parvenu à faire avec succès Simon Auscher, ancien copropriétaire de deux restaurants à Paris et devenu, depuis quatre ans, chef indépendant et star d’Instagram, où il transmet, avec sa touche très personnelle, sa vision de la cuisine.
Sa passion pour la gastronomie remonte à l’enfance : “Comme cadeau d’anniversaire pour mes 12 ans, j’avais demandé à mes parents de m’emmener dans un restaurant étoilé”, se souvient le chef qui a grandi à Strasbourg. Après le bac, il s’inscrit, pour leur faire plaisir mais sans grande conviction, dans une école de commerce et décide rapidement de rentrer en Alsace pour étudier l’école hôtelière. Son parcours le mène ensuite à la fois en salle et en cuisine, dans des restaurants bistronomiques et gastronomiques. Il exerce aux côtés de chef étoilés en France (Jean-Francois Piège à Thoumieux et Philippe Labbé à l’Abeille), puis dirige une table à Hong Kong, avant d’ouvrir deux restaurants à Paris, Tannat en 2015 et Anna en 2017. Il les vend quelques années après : “J’ai signé le compromis de vente de Tannat quatre jours avant le premier confinement”, explique-t-il.
Être stimulé en permanence
Le confinement a offert à Simon Auscher une pause inattendue et une révélation : “J'ai alors réalisé que je venais d’achever la période la plus longue de ma vie durant laquelle je me rendais chaque jour au même endroit, que cette sédentarité n’était pas ce qui me convenait le mieux et que j'avais besoin d’être stimulé de façon différente”, confie le chef qui fêtera cette année ses 37 ans. De plus, gérer un restaurant au quotidien lui pèse : “N’est pas bon manager qui veut. C’est une chose d’embarquer les gens dans son projet, mais c’est autre chose de tenir dans la durée”, témoigne-t-il.
Une lassitude à laquelle s’ajoute une problématique plus personnelle : “Je me suis rendu compte que je n’étais pas capable de bien faire tout [ce que j’entreprenais], que je n’étais pas le meilleur papa, le meilleur mari, le meilleur patron, et que je ne pouvais par conséquent pas bien faire mon métier ni être heureux. Alors j’ai souhaité me recentrer sur moi ainsi que sur ma famille.”
Comme beaucoup de chefs à cette période, il se retrouve chez lui sans activité. Un peu par hasard, pour occuper sa fille alors âgée de 2 ans, il réalise une recette avec elle. “Alors que je n’arrivais pas, le reste de temps, à capter sa concentration plus d’un quart d’heure, elle est restée attentive. J’ai pris quelques photos et les postées sur Instagram.” Jour après jour, il publie d’autres recettes qui rencontrent une audience croissante, et reçoit conseils et encouragements de ses proches
Améliorations constantes et sincérité
Depuis, il n’a pas cessé, veillant à améliorer continuellement le contenu qu'il publie. Sur sa page Instagram, où il se décrit comme 'cuisinier artistique', il dévoile aujourd’hui recettes graphiques et colorées, avec une grande place donnée aux fruits et légumes, ainsi que ses coups de cœur pour les produits, raconte ses voyages, témoigne de ses collaborations, et confie ses réflexions plus personnelles. Aujourd’hui, il compte près de 450 000 abonnés (à fin avril), dans le top du classement des chefs français sur ce réseau social. Son mantra : faire les choses le mieux possible et avec sincérité : “Avec le temps s’est créée une communauté de personnes qui s’identifient, qui s’attachent, dont certains viennent me voir quand je cuisine en résidence.”
Simon Auscher n’a pas rouvert de restaurant depuis la crise sanitaire. Installé à Nice depuis un an et demi, il cumule résidences culinaires, événements et activité de chef privé (notamment des actrices Demi Moore et Margaret Qualley), collaborations avec des marques commerciales, publication d’un livre, Twist, création d’une newsletter sur abonnement… “Ma philosophie, c'est de me dire que de toute façon, si j'ai envie de faire quelque chose, j'y arriverai. Et quand je ne sais pas le faire, je demande à des personnes qui sont plus qualifiées que moi de m'aider.” Une sagesse qui fait ses preuves.
Publié par Roselyne DOUILLET