"La jeunesse déserte nos métiers"
Il a pourtant transmis en avril aux établissements grenoblois sa requête pour quatre jeunes en alternance ou en stage, deux pour la cuisine, deux pour la salle. "Je n'ai eu aucun candidat. C'est la première fois en trente ans, se désole le restaurateur. Nos maisons constituent pourtant des tremplins pour les jeunes, même ceux qui rêvent d'une carrière chez les plus grands." Pour lui, il y a une véritable coupure générationnelle. Un travail à flux tendu, des horaires plutôt lourds, devoir travailler le soir, le week-end et les vacances pendant que les copains s'amusent... Les contraintes sont lourdes et ce métier - sacerdoce que les anciens acceptaient de vivre - fait fuir les plus jeunes. "Et même si on les paie correctement - chez nous c'est minimum 1 500 € net par mois, nourri et blanchi, la jeunesse déserte nos métiers", résume Laurent Gras, qui a choisi de réagir. Depuis septembre, il explore plusieurs pistes. La première serait de supprimer les services moins rentables, comme les déjeuners trop calmes en milieu de semaine.
"Mais c'est quand même fou de devoir fermer", s'offusque Laurent Gras. Il pourrait aussi monter deux équipes pour soulager l'emploi du temps des salariés et mieux attirer des jeunes. "Si j'ai les moyens d'embaucher plus, je le ferai. Mais cela nécessite une réduction forte de nos charges. Car 1 500 € net par mois hors primes, cela représente au final une dépense d'environ 4 000 € par salarié pour l'employeur, et à ce prix, je ne peux pas avoir deux équipes", explique le Grenoblois. Sa troisième piste, déjà engagée, consiste à mobiliser le rectorat pour qu'une seconde classe de mise à niveau post-bac soit ouverte en 2019. "Le lycée Lesdiguières reçoit 300 dossiers pour 24 places. On perd donc 276 candidats", regrette Laurent Gras. Conseillers d'orientation et professeurs principaux de l'Isère vont être aussi invités à une journée de découverte des métiers CHR au Grand Hôtel de Paris à Villard-de-Lans. Enfin, l'Umih 38 pourrait créer un bureau de stages et de placement. "Car je suis loin d'être le seul à souffrir de cette situation", conclut Laurent Gras.
Publié par Nathalie RUFFIER