Palaces parisiens : chacun peaufine son image de marque pour mieux se démarquer
Paris
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Storytelling, personnalités charismatiques et événements 'instagrammables' positionnent désormais les établissements face à une concurrence qui vient aussi des 5 étoiles et des résidences hôtelières de luxe.
"La déco ne fait pas tout dans un palace. Ce
n'est pas non plus le champagne, le caviar ou le mercato entre les chefs qui
vont faire la différence pour le client." Laurent Delporte va au-delà des apparences. Pour ce consultant spécialisé
en hôtellerie de luxe, ce sont "les
petites attentions" qui fidélisent aujourd'hui, "à commencer par demander au client si tout
va bien, s'il se sent bien dans l'hôtel".
Un préalable qui ne peut
fonctionner que si le personnel lui-même "se sent bien, là où il travaille", souligne Nathalie Veg-Sala, maître
de conférences en marketing (gestion des marques de luxe) à l'université Paris
Nanterre et responsable de la licence professionnelle Encadrement et exploitation en hôtellerie et restauration de luxe (LP EEHRL).
L'universitaire parle d'"authenticité" : "On veut du vrai dans l'hôtel, le service, le bâtiment, le
quartier… Tout doit incarner le lieu." Et ce, avec une
histoire et des personnalités. Place au fameux storytelling, la nouvelle clé
pour affiner un positionnement. Notamment à Paris, où les ouvertures et autres
vagues de rénovations ont permis de hisser à près de 1 500 le nombre de
chambres classées palace.
"Créer et développer une identité très forte"
Le Shangri-La a ainsi axé une partie de
sa communication sur le bâtiment historique dans lequel il a élu
domicile, à savoir l'ancienne demeure du prince Roland Bonaparte. Quant
au George V, il met volontiers en scène son charismatique directeur artistique Jeff Leatham. Autre exemple :
depuis mars dernier, le Meurice met en avant son chef pâtissier Cédric Grolet et le labo-boutique créé au
sein même de l'hôtel.
"Les hôtels de
luxe sont en recherche constante d'innovation, de nouveaux produits, de nouveaux
services annexes, commente Nathalie Veg-Sala. Ouvrir ou rénover un
établissement d'exception ne suffit pas. Il faut créer et développer une
identité très forte, pour que ce même établissement puisse se différencier et
attirer une clientèle très exigeante."
Un message reçu au sein du groupe
Dorchester Collection, qui compte le Plaza Athénée et le Meurice, à Paris. Le
premier se positionne haute couture, en raison de sa localisation
avenue Montaigne et les liens qu'il entretient avec la maison Dior depuis
1947 : "Christian Dior a ouvert sa première boutique avenue
Montaigne pour habiller les clientes du Plaza Athénée", raconte Béatrice David, directrice commerciale
et marketing des deux palaces parisiens de la Dorchester Collection.
Quant au
Meurice, "il incarne l'art de vivre à la française et l'art
contemporain, que ce soit par la présence passée de Dali dans l'hôtel ou le
Prix Le Meurice pour l'art contemporain", ajoute-t-elle.
Sortir des sentiers battus
Pour se
différencier, il faut donc étonner et sortir des sentiers battus. Conciergerie performante et connectée, art-concierge au Royal Monceau,
bar à ciel ouvert au Shangri-La… tout est bon pour surprendre.
Chaque palace y
va de son "expérience unique".
L'événementiel devient un moteur, une dynamique, une vitrine aussi. "Le 26 juin, nous organisons une soirée
Beverly Hills. Ce sera festif, glamour, avec strass et paillettes",
détaille Solène David, à la tête de
la communication du Peninsula. Un temps fort qui sera l'occasion d'alimenter
les réseaux sociaux.
Car la promotion d'un palace passe désormais par Facebook
et Instagram, qui permettent d'attirer une clientèle plus jeune et rester
offensifs face à certains 5 étoiles en embuscade, à l'instar du Brach, qui
ouvrira en septembre dans le XVIe arrondissement, ou des résidences
hôtelières de luxe, tels que les somptueux appartements de La Réserve, au
Trocadéro.
Chaque établissement peaufine ainsi son ADN et cultive ses
différences. Conséquence : "La
guerre des palaces n'aura pas lieu, conclut Laurent Delporte. Aujourd'hui, l'enjeu c'est avant tout la
destination : c'est Paris." Entre insécurité, propreté et
embouteillages, l'image écornée de la capitale serait, selon lui, la plus
grande menace pour les palaces.