Paul Bocuse : Quand on pense qu'on a réussi, c'est souvent qu'on a raté, et la plus belle réussite c'est la santé (rires). Pour revenir à la question, il faut de l'exigence. Et c'est important aussi d'avoir une certaine discipline. De la rigueur aussi et il n'y a même pas besoin de le dire : il suffit de donner l'exemple. Vous savez, faire bien un travail ne prend pas plus de temps que de le faire mal. Le reste, c'est le détail. Je me dis toujours, et c'est aussi ce que dit Michelin, que les plus belles performances sont celles qui durent."
Ces derniers mois, vous êtes allé plusieurs fois à l'hôpital. Quel regard portez-vous aujourd'hui sur ces moments difficiles ?
Que diriez-vous finalement de la vie, de votre vie ?
Que c'est un gag et qu'il ne faut pas trop se prendre au sérieux parce qu'elle est trop courte. Que la mienne fut assez fantastique car j'ai côtoyé des gens exceptionnels. Pendant la guerre, quand les copains tombaient à côté de moi, je me disais 'Pourquoi lui et pas moi ?', et cela m'a donné un certain recul sur les choses. Alain Ducasse, qui a été rescapé d'un accident d'avion, doit sans doute avoir la même conception et le sentiment que plus rien ne peut lui arriver. Je vis à mon rythme. Je me couche quand j'ai sommeil et je me suis longtemps levé de très bonne heure. À l'heure du bilan, on ne se souvient que des bons moments et l'on oublie les autres. Moi j'ai croqué la vie, j'ai tout fait et n'ai rien voulu laisser au hasard. J'ai le sentiment d'être toujours en apprentissage. J'ai toujours ce souci de la transmission de notre métier car je pense qu'il y a aujourd'hui une jeunesse formidable. J'ai pu m'en rendre compte lorsque j'allais à l'Institut Paul Bocuse que je sais en de bonnes mains. Il faut axer notre métier sur l'avenir, le passé on s'en fout. Et j'ai toutes les raisons d'être rassuré sur l'avenir.
Paul Bocuse
Publié par Jean-François MESPLÈDE
mercredi 24 janvier 2018