Enfant du
pays, Éric Maio a tenu pendant vingt ans l'Auberge Éric Maio à Montauroux (Var). Étoilé Michelin en 2005, l'endroit avait acquis une
solide réputation mais, en décembre 2015, le chef a annoncé la
vente de son restaurant gastronomique. "J'avais toujours dit que le jour où je
me lasserai, je vendrai, explique
le chef. Cela
faisait vingt ans que j'étais au même endroit, j'avais
vraiment l'impression de faire tous les jours les mêmes gestes, la même
routine. Et j'avais surtout besoin de repos, de respirer. " C'est un ami, David Carré, qui a racheté son établissement,
renommé depuis Le Carré d'ange. Après deux ans de pause, de voyages
et de consulting, Éric Maio a rouvert un nouvel
établissement, toujours à
Montauroux, depuis le 20 mars dernier.
Changement de
positionnement
C'est un
changement de positionnement total que le chef a effectué en ouvrant cette
fois-ci le Bô M, installé dans la zone commerciale Horizon. "J'ai toujours eu envie de faire un
bistrot. Dès que j'ai eu l'étoile, j'ai voulu en ouvrir un mais je n'étais pas
seul décisionnaire et ce n'était pas si évident d'envisager de gérer deux lieux
en même temps. Mais l'idée d'avoir un jour un petit coin tranquille pour
recevoir les copains et m'amuser est restée."
Alors qu'à l'Auberge,
Éric Maio dirigeait une équipe de 14 salariés à l'année, le
Bô M est pensé pour fonctionner à deux. En salle, c'est un ancien collaborateur
qui l'a rejoint, Johnny
Diniel. "Plus l'entreprise grandit, plus il y a
besoin de personnel. Bien sûr, j'espère bien faire grandir mon affaire, on
accueillera des apprentis pour la
formation et
transmission mais on restera le plus
longtemps possible à deux",
commente-t-il.
Pour le chef,
ce format offre la possibilité de limiter les charges et de mieux gérer les coûts pour pouvoir
proposer aux clients des prix corrects. Le Bô M compte 36 couverts en
intérieur, 26 en terrasse, une cuisine ouverte sur la salle - à laquelle tenait Éric Maio -, avec un ticket moyen envisagé à 20 €. "Je veux vraiment que ce soit accessible
à tout le monde. Les gens n'ont plus le temps de faire à manger, ils sortent
plus souvent au restaurant mais sont
attentifs aux
prix. Le monde de la restauration a changé, c'est indispensable aujourd'hui de
prendre en
compte ces paramètres."
Une carte
courte
Pour autant, l'esprit
de sa cuisine
est resté le même : une cuisine du
marché, précise, avec des produits locaux simples mais
travaillés. "Aujourd'hui, la cuisine doit retrouver
la véracité des choses et la simplicité. Le produit, c'est 75% du travail. Le principal est de savoir
faire son
marché intelligemment."
Seul en
cuisine, Éric Maio propose une ardoise courte, avec 3 entrées, 3 plats et 3 desserts qui permettent de composer
un menu à 28 €, ainsi qu'une suggestion du jour au déjeuner à 12 €. "Je ne vais pas aller chercher une énorme
marge, du moment que je tiens mon coefficient. Le tout c'est de proposer un bon rapport qualité-prix." En plus de l'ardoise, le chef a quand
même conservé quatre plats phare de l'Auberge, comme son Pigeon préparé
en croûte, avec foie gras, blettes, pignons et truffes ou ses Pommes de terre
Amandine. "Avant même d'ouvrir, la première
question de mes anciens clients étaient de savoir si je ferais encore mon pigeon ! Comme mon but est de faire plaisir, ça
me semblait évident de leur
proposer ces plats."
Pas de gros
investissements à l'ouverture
Pour pouvoir
tenir les prix, Éric Maio a pris l'outil de travail tel
qu'il était. "La cuisine était bien équipée, c'est ce
qui m'a décidé. Mais on ne va pas s'embarquer dans de gros frais. Est-ce que
les gens viennent pour la décoration ou pour l'assiette? J'ai mon idée sur la
question", s'amuse-t-il.
Pour l'heure
donc, pas de gros investissements
avant le
printemps prochain où la terrasse sera aménagée pour être plus confortable.
Si le chef
tient aujourd'hui un bistrot, pour autant, il ne renie en rien la gastronomie. "Le guide Michelin m'a beaucoup apporté, et je prendrais
volontiers tout ce qu'on voudra bien me donner. Ce qui est certain, selon moi,
c'est que les restaurants qui vont rester, quelles que soient leur qualification et leur niveau de
prestation, sont ceux qui ont une vraie notion de rapport qualité-prix."
Pas d'amertume
vis-à-vis de la gastronomie donc, bien au contraire : "Un jour, je retournerai chercher l'étoile.
J'ai besoin de défis pour avancer et le Bô M ne sera pas le dernier", prévient-il.
Publié par Marie TABACCHI