C'est au Cefppa de Strasbourg que s'est tenue en juin la réunion annuelle des délégués bas-rhinois. Principaux extraits du discours de Roger Sengel.
Malgré la crise, l'Alsace a attiré en 2011, 11,7 millions de visiteurs, tous ne sont pas venus dans nos hôtels et restaurants, mais les retombées sont indéniables. En pleine crise économique, alors que d'autres secteurs ne cessent de détruire l'emploi et que nous déplorons au mitan de l'année 2012, un taux record de chômage, la restauration française a créé 58.000 emplois nouveaux et 218.000 offres d'emploi sont encore à pourvoir en France ! En Alsace, en l'espace de 10 ans, l'emploi dans la restauration a progressé de 26 %.
On peut affirmer aujourd'hui que dans le domaine social, notre profession a rattrapé son retard et je crois aussi utile de rappeler que dans la restauration alsacienne 10 % seulement des salariés sont rémunérés au salaire minimum et que nos salaires en général sont les plus élevés du commerce, qu'il soit alimentaire ou non.
Sur les augmentations de salaire ou de charges sociales :
Les salaires et charges dans la restauration pure s'élèvent déjà de 40 à 50 % du chiffre d'affaires et même au-delà par la restauration gastronomique sans activité hôtelière. Il n'est pas possible d'aller au-delà ! Dans le même esprit, nous dénonçons d'ores et déjà tout relèvement de charges sociales qui briserait la dynamique actuelle en matière de recrutement et d'investissement. Nos collègues allemands dont on ne cesse de nous opposer le dynamisme et le niveau de prix, n'ont pas de salaire minimum à gérer, font et défont les CDD à leur guise, acquittent toujours moins de charges sociales et s'affranchissent de nombreuses mesures visant à protéger l'emploi. Sans environnement fiscal et social supportable, nous ne pouvons poursuivre notre modernisation et nos investissements à long terme et pour établir une concurrence saine avec les autres pays européens une harmonisation des charges sociales et fiscales est indispensable.
Heures supplémentaires :
Autre menace et non la moindre, la suppression annoncée des exonérations de charges sociales sur les heures supplémentaires. Celles-ci on le sait, ont toujours posé problème dans la restauration, qui se doit de proposer à sa clientèle des plages d'ouverture le plus large possible, avec des périodes d'activité très fortes et d'autres beaucoup moins prégnantes. L'exonération de charges sur les heures supplémentaires a permis leur meilleure prise en compte dans la restauration, de répartir les charges salariales sur une période plus longue et de permettre véritablement à nos salariés de travailler plus pour gagner plus.
Dans notre activité, nous avons de nombreuses TPE, très petites entreprises de moins de 10 salariés, qui ne peuvent substituer aux heures supplémentaires un nouvel emploi. La suppression de l'exonération de charges sur les heures supplémentaires sera un vrai problème pour elles.
Rythmes scolaires :
Nos métiers n'ont ni vocation, ni compétence à intégrer le débat sur l'incidence des rythmes scolaires, sur la santé des enfants et leurs capacités d'apprentissage. En revanche, beaucoup de nos entreprises calent leur activité sur les rythmes et congés scolaires et à ce niveau nous demandons à être partie prenante dans la concertation que le gouvernement a promis de mettre en oeuvre. Nous demandons d'ores et déjà que soit maintenu le week-end de 2 jours, le retour à une semaine de 4, 5 jours sera préjudiciables aux courts séjours qui constituent la part la plus importante de l'activité hôtelière. Nous sommes favorables à l'allongement des vacances de la Toussaint, Noël, février et Pâques et un raccourcissement des vacances d'été, sous réserve de mettre en place un zonage du type de celui des vacances de février et de Pâques qui a démontré son efficacité économique.
Paracommercialisme :
L'avantageux statut d'auto-entrepreneur a démultiplié l'activité de chef à domicile, perpétré notamment par un certain nombre de nos salariés qui offrent leurs services sous ce statut exonéré je le rappelle de toutes charges sociales et fiscales, sous un seuil de chiffre d'affaires jamais atteint. Inspirés par les émissions de téléréalité sur la cuisine, des particuliers proposent leurs services sur la toile pour vendre des dîners, sans aucune fiscalité. Les agriculteurs et viticulteurs multiplient les opérations, caves et fermes ouvertes, pour certaines de ces dernières tout au long de l'été. Aussi il m'a semblé utile de rappeler notre position vis à vis du paracommercialisme.
Nous n'hésiterons pas à engager des procédures contre des structures qui ont une activité commerciale régulière, sans être soumis aux mêmes règles fiscales , sociales, administratives et règlementaires.
Titre Maître Restaurateur :
Notre département a bien intégré la démarche qualitative de maître restaurateur puisque nous avons à ce jour 70 restaurants qui peuvent exciper du label. Eu égard au potentiel d'établissement susceptible d'être distingué, il y a encore de la marge. Ce qui enraye la diffusion de maitre restaurateur, c'est le manque de lisibilité du titre lié à une communication confidentielle. En instaurant le label, le ministre du commerce, de l'artisanat et du tourisme avait promis une campagne de communication, dont nous attendons toujours l'avènement. Cette carence est d'autant plus regrettable que les conditions requises sont précisément celles que le consommateur recherche de plus en plus. Traçabilité des produits, régionalisme, authenticité ! Proximité, professionnalisme ! Nous allons donc nous attacher à poursuivre la labellisation de nos collègues et à les inciter à s'inscrire dans la démarche. En revanche, il ne nous paraît pas utile de charger encore les cartes de restaurant, avec des mentions supplémentaires concernant les produits allergènes, les plats diététiques, les surgelés bruts, etc…
Apprentissage :
En Alsace, l'objectif du Conseil Régional est de passer de 20.000 apprentis tous métiers confondus en 2012 à 25.000 en 2015. Alors oui, au développement de l'apprentissage, mais d'un apprentissage de qualité, seul garant pour un jeune de trouver un emploi pérenne à l'issue de sa formation. Ce qui implique que les maîtres d'apprentissage soient des professionnels confirmés et que les agréments pour former ne soient pas systématiquement allégés. L'apprentissage doit être tiré vers le haut si on veut vraiment lui redonner des lettres de noblesse et les maîtres d'apprentissage ont aussi le devoir de respecter les règles. J'ai été interpellé à plusieurs reprises par le Cefppa , me signalant que des maîtres d'apprentissage « gardent », les apprentis dans l'entreprise, la semaine où ils devaient être à l'école, invoquant le « besoin » de main d'oeuvre, sans même prévenir le Cefppa. La pratique n'est pas nouvelle, mais elle est redevenue plus forte. Je le dis tout net ce comportement est inadmissible. Un apprenti est en entreprise pour apprendre et non pour occuper un poste de travail à part entière. De telles pratiques accréditent les propos des détracteurs de l'apprentissage, considéré comme une source de main d'oeuvre quasiment gratuite.
Il nous appartient au niveau régional de relayer l'action menée au plan national par notre collègue Régis Marcon à travailler avec les Lycées Professionnels et les CFA, Cefppa en tête, ainsi qu'avec l'Associatin du Maître d'Hôtel Chef de rang. De nos jours plus que jamais, le rôle du service est primordial , c'est la cerise sur le gâteau d'une prestation de restauration et un formidable moyen de fidéliser la clientèle.
Sites de vente en ligne :
Après l'hôtellerie, déjà en proie aux contraintes abusives des opérateurs de vente en ligne, c'est au tour de la restauration d'être la cible du dumping généralisé. Lentement mais sûrement les sites de vente groupés assujettissent toutes les formes de commerce et la restauration n'y échappe pas. En cédant un à un aux sirènes de ces opérateurs, nos collègues vont peu à peu se mettre en situation de totale dépendance et les effets de cette tyrannie seront autrement plus dangereux que la notation des guides gastronomiques.
L'appât du gain, fera que nos clients ne se rendent plus à terme que dans les établissements où ils auront de substantielles remises, de sorte que nos collègues ne pourront plus se dispenser de ces officines qui, elles, ne bradent pas leurs tarifs et s'engraissent sur les prix sacrifiés de leurs clients.
Un prix de vente ne relève pas du hasard, il doit être élaboré en fonction des charges spécifiques et du niveau de prestations de chaque entreprise. Le brader indéfiniment relève, du suicide et réduire la qualité donnera au client le sentiment de se faire avoir de sorte qu'il ne remettra plus les pieds dans l'entreprise concernée.
Nouvelles réglementations :
Parmi les mesures les plus récentes, la formation du personnel aux risques électriques, l'établissement de fiches individuelles de prévention des expositions aux facteurs de risques relatifs à la pénibilité et d'autres encore qui ne manqueront pas de germer dans l'esprit créatif de ces technocrates surdiplômés qui ont en commun de concevoir dans leur tour d'ivoire des textes et règlements destinés à de malheureuses entreprises, où ils n'ont jamais pris la peine de mettre le pied.
Nous ne sommes pas opposés aux règlementations, surtout celles liées à la sécurité de nos clients et de nos collaborateurs, mais dans ce domaine il faudrait tout de même tenir compte de la taille des entreprises et des facteurs réels de risque et de légiférer en conséquence.