Fooding 2014 : « C'est aujourd'hui aux petits bistrots de quartier de faire leur 'coming good' »

Le guide Fooding France-Paris 2014 arrive en librairie, avec ses « 800 restaurants décomplexés » et ses coups de coeur. Alexandre Cammas, directeur du Fooding, répond à nos questions.

Publié le 14 novembre 2013 à 12:33
Du 15 au 17 novembre, vous organisez le Clan des Madones, une opération à laquelle participent 13 femmes chefs. Et cette année, pas de prix du meilleur cuisinier, mais le Fooding de la meilleure cuisinière attribué à Yuri Nagaya. Une démarche féministe ?
Alexandre Cammas : « Nous n'avons jamais cessé de mettre en valeur les filles et les femmes chefs de talent. Je me souviens, en 2005, d'un événement Fooding qui leur était dédié, "La cuisine au beurre par les filles" à la Grande Epicerie de Paris.
Seulement, les femmes chefs sont aujourd'hui de plus en plus nombreuses et talentueuses. Ouvrant tout simplement l'un des meilleurs restaurants de France, rebootant le sandwich français, prête à en remontrer aux plus fins des burgers, réinitialisant en mode coloculinaire la cuisine mixte dans un super bistrot d'auteurs, ou prenant le grand bain du vin dans un bijou de cave à manger !
Le seul hic : on ne les entend pas assez ! C'est pourquoi nous avons décidé de tendre un micro à 13 d'entre elles en les réunissant le temps de trois soirées en un Clan des Madones, et en leur confiant les manettes de ce resto éphémère campé dans un lieu très « mâle » puisqu'il s'agit d'un garage-parking.

La cuisine est-elle différente selon le sexe du cuisinier ?
Alexandre Cammas : C'est une bonne question. Nous y répondons d'ailleurs plus en détail dans le dossier spécial "La cuisine a-t-elle un sexe?" du Guide Fooding 2014 !
En résumé : les cuisines de restaurant ont longtemps été régies par des "mecs". Et il y avait peu de chances que des mecs formatés "mec" et des nanas formatées "nana" (cuisinant pour la famille, souvent au foyer), finissent par se retrouver en cuisine sans une certaine évolution des moeurs et pas seulement culinaires…
Mais tout arrive ! De la même manière que, peu à peu, des femmes ont osé entrer dans l'armée en en adoptant les codes masculins, des femmes de plus en plus nombreuses sont entrées en cuisine comme on entre dans un moule. Etaient-elles pour autant des femmes libérées? Ne jouaient-elles pas plutôt aux hommes? Ou aux femmes (quand Anne-Sophie Pic peint son menu en rose par exemple…), telles que les hommes fantasment le genre féminin ? C'est la question que nous posons à travers cet événement, en ne présentant que des femmes qui s'écoutent ! Que cela vous/nous plaise ou non. Sans se situer par rapport à un genre particulier. En étant juste elles-mêmes. Ainsi, la cuisine des chefs du Clan des Madones n'est ni féminine ni masculine, juste libérée. Plus de préjugé !

Le Fooding d'honneur récompense les « Bars Populaires ». Qu'est-ce qui a motivé votre choix ?
Alexandre Cammas : « Bars populaires » c'est le nom de l'association qui a ouvert des bistrots effectivement plutôt popus dans des quartiers souvent popus. Cela fait tout simplement trois ou quatre ans que cette bande d'agit'popotes nous enchantent avec des lieux formidables (Au Passage, Bones, l'Orillon Bar, les Pères Populaires). Les restos branchés ont mis des années avant de devenir comestibles voire très bons. C'est aujourd'hui aux petits bistrots de quartier de faire leur « coming good » ! 

Le Fooding du meilleur chef locavore récompense Guillaume Foucault, Pertica à Vendôme. Qu'est-ce qui vous a impressionné dans son travail ?
Alexandre Cammas : J'y ai saucé le meilleur jus de viande de l'année et avalé un sorbet au lait d'anthologie. Deux souvenirs inoubliables, ça fait beaucoup dans un menu à 32 euros, surtout à Vendôme. Quelle audace quand même, qu'un chef de talent ose revenir dans son pays pour ouvrir un resto qui aurait gagné à tous les coups dans n'importe quelle grande ville de France. J'espère que la Mairie de Vendôme est derrière lui, vent debout ! Parce qu'il va falloir l'aider à ne pas fermer, sincère et radical comme il est (du décor très personnel, sans fausse sophistication, au régime locavore qu'il s'impose). Ce à quoi nous nous employons.

Le Fooding du meilleur lèche-doigts est attribué ex aequo à trois concepts. Pouvez-vous nous indiquer quel est le point fort de chacun d'entre eux ?
Alexandre Cammas : Les trois ont ouvert des fast-foods d'un  nouveau genre. De haute qualité. Le kebab de Grillé, le hot dog de Frenchie to go et le fish and chips du Sunken Chip sont délicieux, réalisés à partir d'ingrédients triés sur le volet. Espérons qu'un jour, d'aussi bons cuistots se lanceront dans une street food plus française. Il y a tant à faire… Mais il fallait sûrement passer par là pour qu'un jour quelqu'un y pense…  

300.000 visiteurs par mois sur le site du Fooding en 2012. Une application iPhone payante dans le top 5 des ventes l'année dernière. Et le guide papier toujours en vente. Comment évoluent vos canaux pour toucher les clients ?
Alexandre Cammas : Nous venons d'atteindre plus de 400 000 visites mensuelles ! Et nous sommes l'appli payante (3,60 €) la mieux vendue sur l'app store dans la rubrique Alimentation et boisson (plus de 20 000 en 2013, notation quatre étoiles sur cinq, malgré la présence de publicité). Le Guide continue de progresser en vente en kiosque (notre notoriété acquise créant un cercle vertueux), alors même que l'an dernier, nous en avions tiré 17 000 en plus pour les librairies, tous vendus en moins de 3 mois ! Notre meilleur canal : le bouche à oreille, la haute-fiabilité de nos recommandations et, en interne, une fidélité sans faille à notre exigence originelle. Bon à savoir : nous lançons sur le site et en appli en janvier 2014 notre sélection de Chambres de style, pour siester après le déjeuner ou flirter après dîner.

 

Publié par Propos recueillis par Nadine Lemoine



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