du 11 septembre 2003 |
DOSSIER TVA |
Investissements, embauches, communication, réserve de trésorerie, pour les restaurateurs, la baisse de la TVA pourrait avoir de multiples utilisations... toujours très utiles. Les intéressés font part de leur avis, de leurs projets, de leurs espoirs et de leurs craintes.
Par K. Kulawick
JACQUES MAXIMIN
Restaurant Jacques Maximin, Vence (06)
2 étoiles Michelin, 10 employés
J'ai
déjà prévu mon plan si j'arrive à tenir le choc jusqu'au 2e semestre 2004... parce
qu'on ne sait pas à quelle sauce on va être mangé ! Pour moi, ça passera en priorité
dans l'investissement. J'agrandirai ma cuisine.
J'ai toujours voulu faire un bar et un salon... et si je pouvais embaucher un bon second !
Les jeunes rêvent de travailler avec moi, parce que je fais partie des derniers mythes
cuisiniers vivants. Je ne veux pas profiter de ça, mais je ne peux pas les payer pour les
retenir.
Un chef de partie est payé 1 800 e bruts chez moi ; au Martinez, il va gagner 2 000 e
nets. C'est une concurrence contre laquelle on ne peut pas lutter. Je n'ai pas
l'impression de sous-payer mon personnel, mais au lieu de lui donner une prime, je
pourrais transformer ça en salaire et on arrivera à des montants décents. Ce n'est pas
dit que ce sera une chance de trouver plus facilement des employés, mais c'est plus
encourageant d'arriver à 1 500 e qu'à 900 e. Baisser les prix ? Vous plaisantez ! 11 e
le kilo de petits- pois ! Dans 15 jours, ils auront encore augmenté. Les langoustines
sont à 27 e le kilo. Moi, je ne discute jamais les prix avec mes fournisseurs, et le
client, il est là pour payer. Dans la grande restauration, personne ne baissera ses prix,
ça passera dans le personnel, l'investissement. Ceux qui vont baisser leurs prix, ce sera
du second choix. Mon poissonnier s'en fout de la TVA, ça ne le touche pas. La baisse de
la TVA n'aura pas les mêmes conséquences pour tout le monde, il n'y a pas deux
restaurants qui ont le même profil et les mêmes intentions. Il y a une telle disparité
entre les pays d'Europe, et d'écarts de prix entre les produits... Uniformiser la TVA
c'est bien, mais dans les prix d'achat et de vente en Europe, il n'y a rien en commun,
hormis la monnaie... Et puis la TVA, ce sera aussi de la trésorerie pour les jours creux.
FRANCIS BOREL
Directeur du Petit Colombier, Paris XVIIe
Restaurant gastronomique, 15 employés
Je
n'investirai pas dans le restaurant, parce que c'est déjà fait, et ça n'a rien à voir
avec la TVA. Par contre, je vais m'entourer de personnel et ça va dynamiser l'équipe,
parce qu'on travaille beaucoup, et au bout d'un moment, on fatigue. On va pouvoir engager
des gens dans le besoin ; de manière générale, ça va soulager les restaurateurs -
parce que c'est encore différent pour les cafetiers. Je ne vais pas baisser les prix
parce qu'on les serre déjà (ticket moyen à 80 e). De toute façon, on ne travaille pas
si on est trop cher. La chose essentielle est que les gens travaillent et qu'il y ait une
augmentation des salaires. La baisse de la TVA va m'alléger le stress de payer mes
employés. Peut-être que ça apportera un solde positif, que ça ne m'obligera plus à
courir après les banques. On est très peu à avoir un solde créditeur dans ce métier.
Cela permettra d'avoir une meilleure trésorerie. Je souhaite sincèrement que le vote du
16 décembre passe. Sinon, il y aura toujours 100 000 chômeurs de plus dans notre
métier, et à court et moyen termes, c'est la perte de la restauration. Actuellement,
nous sommes 15 personnes au restaurant, et il me faudrait 3 personnes supplémentaires.
Les autres salariés seront augmentés de 10 % si la mesure passe. Dans notre métier, on
ne gagne pas d'argent, c'est une épargne forcée. Moi, je vis avec la trésorerie. Je
viens d'acheter ce restaurant, et j'ai une baisse du CA par rapport à mon prédécesseur
parce que la clientèle américaine n'est pas là... La baisse de la TVA, on en parle tout
le temps, mais on n'est pas dans la confidence. On espère que ça se fera, pour
l'emploi...
OLIVIER BERTRAND
Groupe Bertrand : 1 600 employés, 60 unités (Impala Lounge, Sir Winston, MCM
Café, Latina Café, Bert's, Tsé, Maoh, House of Live, Cafétérias Eris, franchises
Quick, etc.)
Oui, je
suis plus que confiant sur le vote du 16 décembre prochain parce que tous les indicateurs
sont au vert. Je le vois dans les discussions que l'on peut avoir avec les syndicats, qui,
eux aussi, sont très contents. C'est une promesse très engagée du gouvernement, et je
ne vois pas comment il pourrait faire marche arrière. C'est quelque chose d'acquis pour
moi.
C'est un bien nécessaire pour notre activité qui a des problèmes de rentabilité, de
recrutement, etc. La baisse de la TVA va nous aider à créer des emplois, à consolider
nos équipes et à accélérer notre développement. Sur l'ensemble du périmètre du
groupe, on pense embaucher 160 personnes, soit environ 10 % de personnel en plus. Une
partie de cette TVA sera affectée au développement (acquisition de nouveaux restaurants,
création de nouvelles enseignes, etc.), à faire de la publicité et à renforcer notre
communication. Il y a une discussion sur une baisse des prix des produits d'appel dans
certaines activités, mais pas de baisse générale parce que ce n'est pas possible.
On pense, par exemple, au jambon à la coupe dans les cafétérias, pour qu'il y ait tout
de même un impact sur notre clientèle.
BRIGITTE LANNADERE
Gérante du restaurant PDG, Paris VIIIe
Restaurant spécialisé dans le burger, 3 employés
Je
n'ai pas de boule de cristal ! Je sais que le gouvernement s'est beaucoup engagé, et a
fait beaucoup de promesses, mais je ne vois pas qui peut affirmer que c'est gagné. Je ne
serai pas étonnée d'apprendre que le gouvernement retarde le projet d'un an. Notre
restaurant est ouvert depuis 6 mois, et il faudrait
qu'on ait un exercice complet pour savoir exactement ce que ça va nous rapporter.
On va en répercuter une partie sur les prix, mais nous ne sommes pas une multinationale :
entre la possibilité d'avoir un employé de plus (nous sommes à 3 pour l'instant) et de
baisser les prix, on aimerait bien qu'il nous en reste un peu... En théorie, ça doit
baisser notre reversement de TVA de 40 000 ou 50 000 e environ. Le plat moyen à 14,50 e
sera baissé à 13,50 e. Ça nous rapportera de façon indirecte, en faisant rentrer
davantage de gens dans notre restaurant. On est positif sur la mesure, et on l'attend avec
impatience, parce qu'elle va aussi revaloriser les fonds de commerce, et donc, à terme,
ça pourra attirer d'autres capitaux dans la profession...
BRUNO MARTIN
Directeur général du Blue Elephant Paris
Restaurant de cuisine thaïlandaise, entre 55 et 70 employés
On espère
que ça va passer le 16 décembre et être mis en place assez rapidement, mais
malheureusement, on ne maîtrise pas les délais. On croise les doigts...
On n'a pris absolument aucune décision en ce qui concerne les répercussions, car c'est
une décision qui va se prendre au niveau de la direction générale, donc on attend la
suite. Les options sont celles que tout le monde envisage, c'est-à-dire répercussion sur
les prix à la clientèle en partie, augmentation des salaires et investissements. Mais
nous n'avons pas fait de calculs précis sur ce que la TVA allait nous rapporter. C'est un
sujet dont on parle depuis longtemps, qui avance
doucement, alors 'wait and see' ! zzz66f zzz22v
è Baisse de la TVA sur la restauration,
dernière ligne droite
è Entretien avec Noëlle Lenoir, ministre
déléguée aux Affaires européennes, "Le gouvernement maintient plus que jamais son
engagement sur la baisse de la TVA"
è En direct de Berlin, les objections des Allemands
è Jacques Borel, président du Club TVA,
"Les restaurateurs qui ne baisseront pas leurs prix perdront des clients"
è Compte à rebours, les dernières étapes à
franchir
è Organisations professionnelles,
confiance et engagements sur l'emploi
è Saisonniers, priorité à l'emploi
è Baisse de la TVA : l'enquête,
augmentation des salaires contre baisse des prix
è Vous réagissez
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L'Hôtellerie Restauration n° 2838 Hebdo 11 Septembre 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE