du 11 septembre 2003 |
DOSSIER TVA |
n JACQUES BOREL, PRÉSIDENT DU CLUB TVA
Avec la création du Club TVA en 2000, Jacques Borel est en première ligne tant sur le plan français qu'européen, en matière de lobbying pour la baisse de la TVA sur la restauration. Le point sur l'avancement du dossier.
Propos recueillis par P. Carbillet
L'Hôtellerie : Où en êtes-vous dans le dossier TVA ?
Jacques Borel : Nous avons gagné la première partie de la bataille, mais il nous
reste encore deux autres étapes et pas des moindres à franchir. La première étape a
été l'inscription de la restauration dans la liste des services susceptibles de
bénéficier d'une TVA à taux réduit. C'est ce que l'on appelle l'inscription de la
restauration dans l'annexe H. Il nous a fallu une grande force de conviction, mais nous
avons été très aidés par Madame le ministre Noëlle Lenoir qui, sur ce dossier, a fait
un travail de très grande qualité. Mais la bataille n'est pas encore gagnée : il nous
reste la deuxième phase, qui elle est décisive : l'adoption de cette mesure par les 15
ministres des Finances européens.
De ce côté-là, rien n'est encore gagné car nous avons une forte opposition de la part
des Allemands. Ils craignent en effet, qu'une fois la restauration inscrite dans l'annexe
H, leurs restaurateurs viennent leur demander de bénéficier eux aussi d'un taux de TVA
réduit... Et pourtant, en ma présence, au cours d'un entretien avec le ministre des
Finances allemand, les restaurateurs allemands se sont engagés à ne pas présenter ce
type de demande avant 2006. La troisième étape sera la mise en application de la mesure
en France. Mais il ne sert à rien d'anticiper, nous devons d'abord nous focaliser sur
cette deuxième phase.
Deux prochains rendez-vous nous donnerons une meilleure vue sur le sujet : la réunion
d'Ecofin le 12 septembre à Stresa, mais surtout la réunion des ministres
franco-allemands le 18 septembre prochain à Berlin.
L'Hôtellerie : Quels sont vos arguments pour
convaincre les récalcitrants ?
Jacques Borel : Sur ce dossier, nous ne sommes pas en position de demande, mais de
vente. Nous devons convaincre Bruxelles et le gouvernement. Quel est l'objectif de
Bruxelles ? Baisser le chômage et le travail au noir en créant plus d'emplois. Pour
créer plus d'emplois, on a besoin de plus de clients. Pour avoir plus de clients, nous
devons baisser nos prix et rendre les établissements plus attractifs, à partir de là,
on aura plus de clients et donc on aura besoin de plus de personnel. Ceux qui ne
pratiqueront pas cette politique se verront sanctionner par la loi du marché. La position
des membres du gouvernement français est unanime : il faut relancer la machine
économique par une baisse d'impôt.
L'Hôtellerie : Quels sont les engagements de la
profession ?
Jacques Borel : Les membres du Club TVA ont pris l'engagement envers le
gouvernement français d'appliquer la règle des trois tiers mais en respectant leurs
marges propres. Les membres du Snarr (syndicat national de la restauration rapide) sont
déjà aux 35 heures, ils axeront donc leurs efforts sur les prix.
Je recommande de répartir en trois cette baisse de TVA : pour la clientèle, le personnel
et l'investissement.
Si les professionnels respectent cette règle, ils auront une augmentation de 12 à 15 %
de leur clientèle sur 3 ans à condition de respecter cette règle des trois tiers.
Celui qui prendra pour lui cette baisse de TVA, sans contrepartie d'investissement,
d'amélioration des salaires, d'attractivité du produit, n'aura rien. Les clients sont
beaucoup plus attentifs sur les prix qu'on ne le pense.
Mais attention ! Baisser les prix, cela ne veut pas dire baisser tous les prix de sa
carte, il faut savoir cibler cette baisse des prix, et en faire un argument marketing. Il
faut faire savoir aux clients que les choses changent : par exemple pratiquer - 10 % sur
le menu d'appel. Il faut savoir que les clients en règle générale ne connaissent en
moyenne que 6 prix sur votre carte. Cette baisse de 10 % sur votre menu d'appel aura un
impact important sur votre clientèle, pas la peine en même temps de baisser les autres
prix de la carte, personne ne s'en rendra compte, et vous ne réaliserez aucune vente
supplémentaire. Autant dire que nous devrons aussi prévoir des actions de communication
sur le sujet quand la mesure sera votée pour bien faire comprendre aux consommateurs
qu'ils ont des opportunités dans les restaurants.
Il ne faudra pas pour autant faire de fixation sur la seule baisse des prix, il faudra
investir sur la formation professionnelle et les salaires. En formant votre personnel,
vous diminuez votre turn-over, vous offrez un meilleur service, de meilleures marges.
Si les restaurateurs réinvestissent cette baisse de TVA dans leur affaire, ils
obtiendront une augmentation de leurs ventes de 12 à 15 %. Ceux qui ne joueront pas ce
jeu perdront des clients, d'autant plus qu'ils se trouveront dans des zones de forte
concurrence. Nous avons conclu un engagement moral avec le gouvernement, nous nous devons
de le respecter. zzz66f
Le Club TVA, 3 années de lobbying Septembre
2000 : Jacques Borel crée le Club TVA JB avec Pierre Blanc (Les Frères Blancs),
Jean-Paul Brayer (Groupe Flo), Louis Le Duff (Groupe Le Duff) et Philippe Hamon
(Wagons-lits). Rapidement, ces 'pionniers' seront rejoints par 100 restaurants
indépendants, 30 chaînes d'hôtels et de restaurants et 10 chefs étoilés. "C'est
grâce à ces 4 premiers adhérents que cela a pu se faire, car l'argent est le nerf de la
guerre. Vous avez besoin des meilleurs fiscalistes, des meilleurs économistes pour vous
aider à monter vos dossiers. Nous n'étions pas dans une politique de demande, mais de
vente, et pour cela, nous devions avoir les meilleurs arguments et les meilleures
analyses. En mai 2001, lors d'un voyage à Bruxelles, j'ai pris conscience qu'il
s'agissait d'une bataille européenne et pas seulement française. Il fallait donc agir au
niveau européen, et établir un certain nombre de contacts pour convaincre nos
partenaires européens de la nécessité de faire bénéficier la restauration d'un taux
de TVA réduit." |
Taux de TVA applicable en Europe
Taux de TVA normal | Taux de TVA réduit | Taux de TVA restauration | Taux de TVA hôtellerie | |
France | 19,6 | 5,5 | 19,6 | 5,5 |
Allemagne | 16,0 | 7,0 | 16,0 | 16,0 |
Autriche | 20,0 | 10,0 | 10 et 20 | 10,0 |
Belgique | 21,0 | 6 et 12 | 21,0 | 6,0 |
Danemark | 25,0 | - | 25,0 | 25,0 |
Espagne | 16,0 | 7,0 | 7,0 | 7,0 |
Finlande | 22,0 | 8 et 17 | 22,0 | 8,0 |
Grèce | 18,0 | 8,0 | 8 et 18 | 8,0 |
Irlande | 21,0 | 13,5 | 13,5 | 13,5 |
Italie | 20,0 | 4 et 10 | 10,0 | 10,0 |
Luxembourg | 15,0 | 3 et 6 et 12 | 3,0 | 3,0 |
Pays-Bas | 19,0 | 6,0 | 6,0 | 6,0 |
Portugal | 19,0 | 5 et 12 | 12,0 | 5,0 |
Royaume-Uni | 17,5 | 5 | 17,5 | 17,5 |
Suède |
25,0 | 6 et 12 | 25,0 | 12,0 |
è Baisse de la TVA sur la restauration,
dernière ligne droite
è Entretien avec Noëlle Lenoir, ministre
déléguée aux Affaires européennes, "Le gouvernement maintient plus que jamais son
engagement sur la baisse de la TVA"
è En direct de Berlin, les objections des Allemands
è Compte à rebours, les dernières étapes à
franchir
è Organisations professionnelles,
confiance et engagements sur l'emploi
è Baisse de la TVA : le point de
vue des restaurateurs, investir dans le personnel
è Saisonniers, priorité à l'emploi
è Baisse de la TVA : l'enquête,
augmentation des salaires contre baisse des prix
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L'Hôtellerie Restauration n° 2838 Hebdo 11 Septembre 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE