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du 11 septembre 2003
DOSSIER TVA

Saisonniers

Priorité à l'emploi

Baisse ou pas baisse ? Qu'en pensent les saisonniers ? Ont-ils confiance dans l'avenir ? Quelle que soit l'entreprise, une constante après interviews : si manne il y a, elle sera favorable à l'emploi dans le secteur.

Propos recueillis par S. Soubes

n MICHEL PORCEL, p.-d.g. de Restoleil
Soit une quarantaine d'enseignes (mer et montagne)
Nous avons un chiffre d'affaires prévisionnel qui s'élève à 21 Me, ce qui représenterait quelque 2 800 000 e d'économie. Effectivement, ce serait une manne. On ne peut pas appeler ça autrement. Compte tenu des derniers événements, et notamment du déficit budgétaire, je crains que cette mesure ne puisse être adoptée le 16 décembre. Cela me paraît juste. Il y a encore trop de gens, trop de pays à convaincre. Une négociation prend toujours du temps. Et puis, la France soulève pas mal de suspicions. Toutes les conditions ne me semblent pas réunies. Concernant ses répercussions, je suis favorable à la règle de 3 : un tiers clients, un tiers salariés, un tiers entreprises, sachant que c'est de la théorie pure. Nous ne maîtrisons pas la réaction des salariés ou des clients. Cette règle serait une base qu'il faudra ajuster. Certains représentants syndicaux sont prêts à prendre des engagements en contrepartie. Personnellement, je pense que plus on est libre, mieux on se porte. Si un cadre était fixé - ce qui, toutefois, ne m'étonnerait pas -, il faudrait qu'il soit applicable. Quel que soit le cas de figure, je pense que cette mesure peut vraiment servir à rattraper notre retard social par rapport aux autres métiers de service. En priorité aux yeux des jeunes.

n SERGE JORRAND, Hôtel du Rhône et des Thermes, à Néris-les-Bains (03)
1 étoile, 28 chambres, restaurant et bar, 5 à 6 personnes en saison, le patron travaille seul hors saison
Si la mesure passe, j'embauche quelqu'un pour me seconder. Je réorganise les tâches. Ça, c'est sûr et certain. Je n'ai pas encore calculé ce que cela représentait exactement. Si cela peut me permettre de motiver mon équipe, je le ferais aussi. J'ai des saisonniers qui reviennent depuis 10 ans. Je crois que les bons patrons font les bons ouvriers, et vice versa. Il est important de motiver son personnel. Ne pas le faire est ridicule. Quant au vote, moi j'y crois. Si le gouvernement revient en arrière, il va y avoir un tollé général. Le gouvernement sait très bien qu'on en a besoin pour investir dans l'emploi et dans de meilleures conditions de travail, pour tout le monde. On a fait des réunions, et on s'est aperçu que la plupart des gens, qui sont extérieurs au métier, pensent qu'on va ramasser des sous. C'est faux. La baisse de la TVA va seulement donner un peu d'air à des chefs d'entreprise qui travaillent 14 heures par jour pour s'en sortir.

n OLIVIER HAMEL, La Plage d'Or, à Vierville-sur-Mer (14)
Brasserie et bar, 4 personnes en été, 1 en hiver (hors couple de patrons)
Je n'ai pas d'idée sur la somme que ça représenterait. Je n'ai pas calculé parce que tant que tout n'est pas encore défini... Si l'on obtient cette baisse, je commencerai par prendre un saisonnier supplémentaire. Et j'investirai dans l'équipement. Je ne suis pas pour des baisses de prix. Nous avons déjà une politique de bas prix, et puis nous avons dû faire face cette année à une augmentation importante des prix, que ce soit chez Metro ou Cash. Est-ce que la mesure va être votée ? On était confiant en juillet. Depuis la rentrée, c'est différent. Les dernières annonces, notamment budgétaires, ne me rendent pas optimiste. Et pourtant, dans le contexte économique actuel, et si l'on veut relancer l'emploi dans notre secteur, on en a bien besoin.  

n ISABELLE PINET, Le Martin's Pub, à Saint-Martin-de-Ré (17)
Restauration traditionnelle, bar et brasserie, 15 personnes en pic saisonnier et 8 en basse saison
J'espère que ça va avoir lieu, même si je n'ai pas encore calculé. Pour moi, ce sera un surplus de trésorerie qui aura de réelles répercussions sur l'emploi. Si on obtient cette baisse de TVA, je vais engager plus de personnes. Avant, la saison battait son plein en juillet et août. Maintenant, les gens viennent différemment, ils étalent leurs vacances par petits bouts et sur une plus longue période. La saison s'est allongée et s'est morcelée. On doit prendre du personnel sur 4 mois au lieu de 2. En plus, sur l'île de Ré, on a de terribles problèmes pour les loger. On est obligé de louer à l'année si l'on veut qu'ils aient de bonnes conditions de logement. Vous imaginez l'investissement que cela représente dans l'état actuel des choses.  

n FRANÇOIS EFFLING, Le Jade, à Pornic (44)
Restaurant traditionnel, 4 personnes en hiver, 9 à 10 en été
Pour un chiffre d'affaires de 30 000 e mensuels, je compte 1 800 e de récupérés. Pour moi, l'utilisation de cette somme passe en priorité dans une augmentation conséquente des salaires. Au minimum 150 e. Et j'aurais aussi besoin d'une personne à mi-temps en plus en cuisine et en salle. Grâce à cette baisse, je vais pouvoir être aussi plus proche du client. Vous savez, quand on est moins stressé, on travaille mieux. Chez moi, je vais bloquer les prix pendant 1 an, à l'exception du premier menu (qui est à 13,80 e et que je voudrais passer à 14,40 e). Le premier menu est fragile, c'est le plus ric-rac. Cette modification de prix est destinée seulement à satisfaire la clientèle. Je ne suis pas devin, j'attends le 16 décembre avec impatience. J'espère qu'on va obtenir cette baisse parce qu'on la mérite. A terme, si le gouvernement ne fait aucun geste, c'est la fin de la restauration traditionnelle. Cette baisse aurait déjà dû intervenir l'an dernier. On est sur le fil du rasoir. Elle doit aussi nous permettre de trouver des jeunes qui veulent s'investir. Je crains, si on ne passe pas ce cap, que les gens n'aient plus du tout le cœur à se battre pour ce métier qui fait pourtant partie du patrimoine et de l'image de la France.

n JEAN-MARC EDET, Le Grand Bleu, Le Pouliguen (44)
Restaurant-brasserie de port, 4 permanents, 9 personnes l'été
Je n'ai pas fait le calcul parce que j'ai peur que nos amis européens nous mettent des bâtons dans les roues. Quoi qu'il arrive, malgré les promesses, on risque de passer à la trappe. Je suis d'une nature pragmatique, tant que ce ne sont que des promesses (qui n'engagent que ceux qui les écoutent), tant que je ne lirais pas la mesure dans le JO. Je suis comme Saint-Thomas, j'évite de tirer des plans sur la comète. Cette mesure représente pour moi le moyen le plus vraisemblable pour revaloriser les salaires et motiver le personnel. J'utiliserais cette manne pour trouver et garder des 'bons'. Ce serait aussi une marge de manœuvre pour réinvestir dans l'entreprise, et s'il reste un peu d'argent, j'en ferai bien sûr profiter nos clients. Je baisserais l'ensemble de la carte et des formules de 1 à 5 % pour qu'ils puissent consommer plus et se faire plaisir en venant plus souvent. A l'heure actuelle, nous n'avons quasiment plus de marge nette. En restauration, en moyenne, nous sommes à 4 % de marge nette ; c'est trop léger pour durer. Il suffit qu'il y ait un cycle un peu gênant - marée noire, météo - et nos entreprises sont au bord du gouffre. Beaucoup de petites structures ferment parce qu'elles ne peuvent pas dégager de marges suffisamment viables sur la durée. La baisse de la TVA est aussi nécessaire dans ce sens.  

n ANNIE FAMOSE, 11 restaurants et bars à Avoriaz (74)
120 personnes l'hiver, 25 l'été (fermeture de plusieurs établissements)
Nous n'avons pas encore étudié les chiffres. Nous attendons avant de le faire. Je pense que le président de la République tiendra ses engagements, et malgré une conjoncture difficile, je crois qu'il va aller au bout de ce qu'il a promis. Cette baisse sera une bouffée d'oxygène pour le métier. Nous en avons besoin. Ce qu'elle peut apporter devrait me permettre de moderniser mes exploitations. Je baisserais probablement aussi un peu les prix. A Avoriaz, nous rencontrons comme dans d'autres stations un problème de logements qui nous limite en matière d'embauches. Néanmoins, nous avons besoin de recruter l'hiver. Je recruterais donc. Je transformerais sans doute aussi des CDD en CDI.

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Annie Famose : "Cette baisse sera une bouffée d'oxygène pour le métier."

n JÉROME CRÉPATTE, Le Moulin de Fourges (près de Giverny 27)
Restauration de groupe et traditionnelle, 3 à 4 personnes en hiver, de 15 à 20 d'avril à octobre
Ça va nous apporter de la trésorerie. Une amélioration de l'ordre de 10 à 12 %, soit entre 100 et 120 000 e. Je crois que la mesure va être adoptée. Je suis optimiste parce qu'il s'agit de bon sens. C'est une mesure fondamentale pour la profession. Je n'y croyais pas l'an dernier, j'avais la sensation que c'était très lointain des préoccupations du gouvernement. Aujourd'hui, j'ai le sentiment que ça va avancer. Dès que la mesure passe, je vais intégralement ou presque investir dans le développement de l'équipe. Comment ? Je n'en sais rien encore. Il est certain que je vais chercher à recruter, et je vais améliorer les conditions salariales des personnes en place. Nous avons une entreprise relativement moderne, l'urgence porte sur de meilleures conditions de travail. Il faut miser sur l'évolution du personnel en restauration qui en a bien besoin. Si jamais la baisse est effective dès le début de l'année prochaine, je vais enfin pouvoir pratiquer une politique d'embauche plus audacieuse. Embaucher plus et à de meilleurs niveaux de rémunération. Je pense aussi au principe des intéressements, pour attacher les gens à l'entreprise. Il faut que ces derniers aient envie de revenir année après année, qu'ils ne se posent même pas la question. Vous savez, c'est aussi pour la restauration traditionnelle une mesure vitale. A titre d'exemple, si le contexte ne bouge pas, chez moi, dans 3 ans, j'arrête la restauration individuelle.

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Jérôme Crépatte : "J'ai le sentiment que ça va avancer."

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